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A l’occasion de la semaine du développement durable qui se tient du 1er au 7 avril, focus sur cinq initiatives originales d’entreprises.

Cinq ans après le premier «Grenelle de l'environnement», le développement durable est-il en perte de vitesse? Vu l'absence des questions environnementales dans la campagne présidentielle, la réponse semble positive. Pourtant, du côté des entreprises, la vague verte continue de déferler. «Parce que les contraintes réglementaires autour du développement durable n'arrêtent pas de croître: directives européennes sur la gestion des déchets, dispositions issues du Grenelle 2 ou certification ISO 26 000 sur la responsabilité sociétale...», souligne Pia Imbs, responsable du MBA développement durable de l'EM Strasbourg.

Les entreprises sont donc obligées de s'adapter à cette nouvelle donne... sans pour autant devenir philanthropes. Les projets les plus plébiscités sont ceux qui permettent de faire des économies ou de développer une nouvelle offre. Les agences de communication, en particulier, se servent de l'interne comme d'un laboratoire pour tester des programmes proposés ensuite à leurs clients. «Les entreprises ont aujourd'hui compris qu'elles pouvaient faire du business avec le développement durable, note Pia Imbs. Soigner son image sous l'angle social et environnemental est devenu crucial.» Du coup, les événements liés à ce thème deviennent stratégiques, à l'interne comme à l'externe. Voici quelques exemples significatifs.

 

BETC plante du houblon sur son toit
«Cette semaine, nous réalisons des travaux sur le toit de l'agence pour planter du houblon», dit, d'un air détaché, Loïc Fel, responsable du développement durable de BETC. Le «village BETC», et ses 750 habitants, ne s'est pas dépaysé à la campagne, et se trouve toujours dans le 10e arrondissement parisien. Les salariés vont être «réquisitionnés» pour l'arrosage de la houblonnière puis en septembre pour la récolte. Un brasseur le transformera en bière, distribuée en fin d'année aux collaborateurs. Le houblon sur le toit ne devra pas perturber la vie de ses 500 000 abeilles voisines, logées dans six ruches différentes, et qui produisent, elles, du miel destiné aussi à l'estomac des salariés. «Le but du jeu est de relocaliser la production et de réinstaller de la biodiversité en villes», explique Loïc Fel. D'ailleurs, BETC ouvre un deuxième jardin d'insertion avec Emmaüs, où les salariés commencent depuis cette semaine à travailler. Mais Loïc Fel a mené un autre combat ces dernières années: il s'est attaqué aux plaques de «cadapack», utilisées pour réaliser des présentations chez les clients. Problème, le cadapack est composé de polypropylène, autrement dit ultrapolluant. «En 2010, on a réduit l'épaisseur des plaques de 6 à 3 mm, puis on a mis en place, en 2011, un circuit de recyclage», détaille-t-il. Des initiatives qui ne sont pas toujours bien accueillies: trois groupes de salariés se sont ainsi créés sur Facebook pour railler les initiatives du responsable développement durable. Leurs noms sont explicites: «Pour que Loïc Fel monte le chauffage» ou «Pour remplacer les abeilles sur le toit de BETC par un couple d'ours slovènes»... Quand les salariés auront humé la houblonnière -qui sent l'ail-, un nouveau groupe devrait fleurir sur Facebook.

 

Mieux met la main à la pâte
Lundi 2 avril, les salariés volontaires de l'agence Mieux ont eu pour mission de préparer un déjeuner à base d'aliments de saison, locaux, bio, non emballés et non industrialisés. Mardi, ils ont ramassé les déchets accumulés sur les berges de Seine, autour de l'agence installée sur une péniche à Boulogne-Billancourt. Et ce jeudi, une collecte de vêtements et d'objets était organisée au profit du Secours catholique. Fondée en 2010 par Thomas Parouty (ex-Fi Système et CRM Company), l'agence interactive Mieux a décidé de passer aux travaux pratiques pour la semaine du développement durable en lançant la «No impact week». Bilan carbone à l'appui, elle mesurera les progrès accomplis puis décidera quelles bonnes pratiques pérenniser. Une opération de sensibilisation qui met aussi en avant le positionnement de cette agence de dix salariés, dont un tiers des budgets concerne des démarches de développement durable: communication sur le projet Smart Green d'Alstom, campagne sur l'économie circulaire pour Suez Environnement, sensibilisation des salariés d'EDF à l'économie d'énergie... «Plus qu'une agence de communication responsable, nous préférons être une agence responsable de communication en commençant par adopter un comportement plus respectueux dans notre vie de bureau», indique Thomas Parouty. Mais l'approche se veut plus globale. Militant vert, impliqué dans le mouvement associatif, ce chef d'entreprise est aussi convaincu que des salariés heureux sont plus créatifs et efficaces. Il mise sur la diversité, favorise les congés solidaires et prend soin de ses free lance. «Ils sont souvent maltraités ou payés à six mois, souligne Thomas Parouty. Ici, nous les associons à la vie de l'agence, nous les aidons à facturer ou leur donnons des conseils juridiques.»

 

Air France lave plus vert
Cette semaine, Air France a annoncé une petite révolution: désormais, tous ses avions ne seront plus lavés au jet d'eau et aux détergents mais avec des lingettes biodégradables. «Ce mode de nettoyage va diviser par 100 la quantité d'eau nécessaire, se targue Pierre Caussade, directeur du développement durable de la compagnie aérienne. Ainsi, pour un Boeing 777, il fallait 10 000 litres d'eau, maintenant 100 litres suffiront. En revanche, cela nécessitera davantage d'huile de coude.» Autre intérêt: les avions pourront être nettoyés n'importe où, plus besoin donc de les conduire sur des aires de lavage. Des économies de kérosène sont également à la clé. «Le transport aérien est souvent montré du doigt pour son impact environnemental. Or depuis sept-huit ans nous sommes engagés dans une chasse au gaspillage de grande ampleur, explique Pierre Caussade. Une démarche qui touche tous les services, du marketing à la direction industrielle.» Ainsi, en octobre, la compagnie a expérimenté un «vol vert» entre Toulouse et Paris, utilisant des biocarburants à faible empreinte carbone. Elle vient, par ailleurs, de décider une autre initiative responsable: sur les vols long-courriers, les clients recevaient des casques jetables; désormais, il s'agira d'un casque écoconçu avec un arceau réglable, et surtout réutilisable. «Cela va réduire nos déchets de 400 tonnes par an», se félicite Pierre Caussade. Les casques «durables» seront nettoyés entre deux vols par un centre d'aide par le travail (CAT) qui emploie une large part de personnes handicapées.

 

Axa fait réfléchir ses salariés

«Cette année, nous avons décidé d'apporter un regard créatif sur les sujets du développement durable avec des créations artistiques ou publicitaires pour faire réagir nos collaborateurs», explique Estelle Bécuwe, manager responsabilité d'entreprises chez Axa France. Au siège français de l'assureur, à Nanterre, où sont employées 6000 personnes, se tient une exposition, avec les affiches des meilleures campagnes de sensibilisation aux causes sociales et environnementales, menées par des organisations non gouvernementales ou des associations. Egalement au programme, le lundi 2 avril ont été organisés à l'heure du déjeuner, un one-woman show humoristique et écolo, baptisé «Charlotte Normand se met au vert», ou encore la projection de courts-métrages. «Depuis 2008, nous menons des campagnes sur les écogestes et il y a des critères liés au développement durable dans notre accord d'intéressement, comme la diminution de la consommation de papier de bureau», précise Estelle Bécuwe. La consommation de papier a baissé de 11% chez l'assureur en 2011. La feuille de paie devrait donc un peu s'épaissir...

 

W&Cie fait une piqûre de rappel
«Pendant cette semaine, nous allons plancher chaque jour sur un thème différent, par exemple le lundi sur les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEE), le mardi sur le papier», détaille Gaëlle Aubry, responsable du développement durable de l'agence W&Cie. Le but est de remettre à l'honneur les écogestes en montrant en parallèle les résultats des indicateurs et les nouvelles actions à mener. «Nous ferons un point sur la quantité de papier recyclé utilisé à l'agence et comment accroître encore cette proportion», poursuit-elle. Dans l'agence de 130 salariés, 90% des salariés ont suivi la formation lancée en septembre dernier et qui comprend trois modules de 2h30: les bases du développement durable, la communication responsable et l'intégration de la responsabilité sociétale par les entreprises. La mission que s'est fixée W&Cie pour 2012: établir une charte fournisseurs, qui favoriserait par exemple les prestataires locaux.

 

Et aussi

Publicis Groupe réfléchit à des «Green days» trimestriels, afin de mobiliser ses collaborateurs tout au long de l'année sur des sujets environnementaux et sociaux... TBWA poursuit son opération «Carbon fighters», qui incite ses salariés à être moins polluants avec, par exemple, de l'affichage devant les ascenseurs: «Prenez les escaliers»...

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