La riposte. Deux ans après Linked In et un an après Google plus, Viadeo vient de mettre sur orbite ses pages entreprises. «Nous réfléchissions depuis longtemps à la création de ces espaces consacrés aux personnes morales, explique Olivier Fécherolle, directeur de la stratégie et du développement de Viadeo. Nous avons profité du lancement de la nouvelle version du site début juillet pour les créer. L'idée est de répondre à un besoin grandissant d'information et de transparence des entreprises.»
Contrairement à son principal concurrent, Linked In, Viadeo n'entend pas cantonner ses pages entreprises à la dimension carrière. «Au-delà de l'onglet panorama – une présentation synthétisée de l'entreprise –, et de la partie “jobs”, nous voulons dépasser le strict champ ressources humaines, nous souhaitons que les sociétés puissent donner une vision plus transverse de leur activité, détaille Olivier Fécherolle. Ainsi elles peuvent créer des groupes de discussions et surtout des onglets “cartes blanches” pour y publier ce qu'elles veulent: renseignements produits, jeux, événements et pourquoi pas même un site e-commerce.»
Cette plus grande ouverture correspond mieux au positionnement de Viadeo, dont les revenus reposent en majorité sur les abonnements (50%), puis sur le recrutement (30%) et la publicité (20%). A l'inverse, Linked In mise énormément sur son activité RH, qui représente aujourd'hui plus de la moitié de son chiffre d'affaires. Mais entre la quasi "O.P.A." de Linked In sur les pages RH et celle de Facebook sur les pages fan, Viadeo va avoir du mal à se frayer une place. D'ailleurs, sur le long terme, le réseau d'origine française compte aussi sur la créativité de ses membres pour co-construire ces pages.
Quant à Google plus, si les entreprises ont bien souvent ouvert une petite vitrine sur cette plateforme, du côté des internautes il n'y a pas foule: par exemple, Publicis Groupe n'y compte que 300 adeptes, Orange, un millier (contre plus de 500 000 fans sur sa page Facebook et plus de 38 000 sur sa page Linked In).
Une arme à double détente
Pour autant, Linked In et Viadeo sont-ils indispensables à l'arsenal de communication corporate des groupes? «Ce serait dommage de s'en priver», répond Stanislas Magniant, directeur de Net Intelligenz, Publicis Consultants, qui vient de publier un livre blanc sur le bon usage des pages pros Linked In. Son argument: bouder le géant américain revient à se priver d'une audience de masse. «En juillet 2012, Linked In était le 26e site le plus fréquenté au monde selon Com Score, rappelle Net Intelligenz dans son livre blanc. Et presque 50% de ses membres suivent plus de 2 millions de pages pros.»
Ces espaces de présentation sur les réseaux sociaux professionnels sont une arme à double détente: d'un côté créer du lien et partager des informations avec les salariés, de l'autre développer une communauté d'actifs autour de sa compagnie, un vivier dans lequel le DRH peut aller puiser quand il a un poste à pourvoir.
«Cela peut devenir une vraie plate-forme éditoriale pour les entreprises, avec un fort impact car l'information est démultipliée, puisque reprise sur les profils de tous les salariés qui la suivent», note Stanislas Magniant. Des possibilités encore peu utilisées par les grands groupes français, selon le livre blanc de Publicis Consultants.
Ainsi, seulement seize sociétés du CAC 40 ont pris en main leur page entreprise sur le réseau social (création d'une page carrière, descriptions détaillées, etc.). Et seules six d'entre elles vont plus loin en publiant régulièrement des statuts sur leur page Linked In. Au final, aucun géant du CAC 40 n'a vraiment intégré à son écosystème de communication ce réseau aux 161 millions de membres dans le monde, conclut ce livre blanc. Dommage, car «47% des membres de Linked In l'utilisent pour connaître et comprendre les dernières tendances de leur secteur d'activité», selon les chiffres du réseau américain.
En termes de fonctionnalités aussi, nous n'en sommes qu'aux débuts, car Linked In et Viadeo cherchent à multiplier les outils innovants pour accompagner les entreprises dans la guerre des talents: «Nous proposons des statistiques avec l'âge moyen des salariés, la répartition hommes-femmes ou encore les profils les plus consultés à l'intérieur d'une société», illustre le directeur de la stratégie de Viadeo. Sur la page entreprise de Linked In, apparaissent également les mouvements des entreprises: les promotions ou les départs. Suivre les nominations dans une société, un outil précieux quand on cherche à postuler dans une nouvelle compagnie.
Pour dialoguer aussi, Linked In gagne à être connu: «Les sociétés privilégient le tout Facebook, y compris pour des sujets corporate, alors qu'ils ne passent qu'au forceps sur cette plate-forme, estime le directeur de Net Intelligenz. Elles devraient plutôt aller sur Linked In pour développer des sujets corporate. Et ne pas hésiter à créer des groupes de discussion autour de thématiques particulières, le développement durable par exemple.»
Les deux réseaux professionnels deviennent donc des vitrines indispensables pour développer sa marque employeur et renforcer les liens avec ses salariés. Et ne pas y être revient à laisser plus de place à ses concurrents. Bien sûr, pour les entreprises, cela représente un investissement, puisque, au-delà des fonctionnalités de base – présentation de la société – gratuites, il faudra bourse délier. Parmi les options payantes innovantes, Viadeo offre même la possibilité de prendre le contrôle des espaces de publicité sur sa page entreprise.
