Design
Alors que le Salon de l'agriculture bat son plein, les industriels de l'alimentaire ne cessent de faire évoluer l'emballage de leurs produits. Six tendances de fond qui redessinent les paquets.

1/ Moins de couches.

Halte au suremballage et aux deuxièmes peaux. Pour Anne-Cécile Fournet-Fayard, dirigeante de l’agence Com Edit, «la montée en puissance du développement durable a imposé à l’industrie une remise en question du packaging», faisant la part belle aux emballages 100% biodégradables et à l’encrage limité. Veuve Clicquot utilise par exemple des résidus de raisin pour son emballage. D’autres ont tenté le packaging consommable ou réutilisable, à l’image du thé Rhoeco qui se transforme en pot de fleur ou des smoothies The Fruits qui deviennent des gourdes. «Lorsqu’on enlève des couches, on réduit le territoire d’expression de la marque», selon Carla Traini, design director chez Landor Paris. Les industriels recourent alors à la technologie, comme Heineken et sa bouteille Fobo, dont on peut suivre le cycle de réutilisation via une application smartphone.

 

2/ Une dose d’intelligence.

Les scandales alimentaires comme la viande de cheval dans les lasagnes ont échaudé le consommateur, de plus en plus attentif à l’origine et à la traçabilité des produits. Le packaging est un élément clé pour fournir cette information. Un peu de technologie permet d’apporter plus de précisions, comme les étiquettes fraîcheur Topcryo, qui changent de couleur en présence de certaines bactéries. Pour sa part, Yanko Design sait indiquer, via une étiquette en forme de sablier, la fraîcheur de la viande, et peut même colorer une brique de lait progressivement à mesure que la date limite de consommation approche. «L’emballage connecté est une véritable tendance», souligne Carla Traini, et peut protéger aussi contre la contrefaçon: «Face aux copies de son cognac en Asie, Rémy Martin propose de scanner ses bouteilles avec son smartphone afin de tracer leur parcours.» Ces outils peuvent aussi simplement répondre à un besoin d’engagement, comme les paquets proposant de la réalité augmentée à l'instar de Lactel Max.



3/ Simple et authentique.

Avec 5 millions de briques de lait vendues en quelques mois, La marque du consommateur (dont les spécificités du produit ont été établies par des internautes), a montré en très peu de temps à quel point un discours authentique et transparent pouvait être porteur… ce qui se retrouve sur l’emballage, sans fioritures. Le client «souhaite que la promesse du packaging soit tenue, qu’une véritable cohérence s’installe entre le graphisme, les arguments marketing et le produit», note Anne-Cécile Fournet-Fayard, de Com Edit. «Il y a cinq ans, on avait des marques “Superman” assurant tout maîtriser. Aujourd’hui, on préfère faire confiance à une marque honnête, même si les produits ne sont pas 100% bio», précise Carla Traini, de Landor Paris. Mathilde Gaist, planneur stratégique senior chez Carré Noir, voit un «retour à la fonctionnalité première du pack, qui est le transport du produit et sa protection».

 

4/ Pas qu’un numéro.

Coca-Cola a ouvert la voie en 2013 avec les bouteilles personnalisables avec son prénom. Nutella avait suivi. Mais pour Anne-Cécile Fournet-Fayard, «le packaging personnalisé n’en est qu’à ses débuts». Avec au centre, la donnée, réutilisée sous forme de «computer art», illustre Carla Traini: «On récolte des données sur le produit, on les interprète avec un algorithme puis on les représente graphiquement pour personnaliser un package à l’extrême.» Exemple: le jus de fruits Granny's Secret qui affiche le nombre de fruits utilisés pour chaque bouteille. Une observation partagée par Mathilde Gaist, de Carré Noir, qui voit une «vraie tendance des chiffres qui reflète le monde dans lequel on vit». Pour elle, cette tendance, qui peut mêler design et fonctionnel, s’appuie sur un autre mouvement: le mix entre emballage minimaliste mais coloré, «mêlant santé et gourmandise».



5/ L’OPA du PET.

De plus en plus de bouteilles de lait sont fabriquées en PET (polyéthylène téréphtalate), plutôt qu’en PEHD (polyéthylène haute densité), si bien qu’aux yeux de l'association des producteurs d'emballages plastiques souples (Elipso), toutes les bouteilles seront faites dans cette matière dans cinq à dix ans. Les bouteilles en PET opaques, explique Com Edit, «peuvent être stérilisées à sec puis remplies dans la foulée, ce qui permet des économies d’eau, de matière première, de temps et facilite la logistique…» Et surtout, elles seraient 20% moins chères. Problème: leur recyclage est bien plus compliqué, d'autant que leur essor a pris de court la filière. La fédération de la plasturgie s’est mise en quête active d’une solution avec les acteurs.



6/ La recette en kit.

Aux antipodes des plats transformés, prêts à consommer, de jeunes start-up tentent le pari d’un retour aux origines en décomposant la recette, façon DIY (do it yourself). Illico Fresco propose ainsi des paniers-repas avec les ingrédients d’un plat conçu par un chef. Marlette, de son côté, s’est spécialisée dans les gâteaux, avec une caution bio. L’un des ressorts de cette tendance, selon Anne-Cécile Fournet-Fayard, est que «le consommateur, séduit par les émissions culinaires, veut se mettre aux fourneaux». Pour les moins cuistots, ces kits peuvent se résumer à un assemblage de sachets pré-dosés, mais laisser libre court à l’imagination pour la décoration, à l’image de Scrapcooking. Très présente à Londres, d’après Carla Traini, cette tendance est encore nouvelle en France, où l’accès plus aisé aux marchés et aux produits frais pourrait, selon elle, limiter sa portée.

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