Quarante-quatre ans après sa création, la Fondation de France, qui abrite aujourd'hui 715 fondations, s'emploie à mieux faire connaître ses propres actions, notamment auprès des grands donateurs.

«Les questions de société méritent des réponses». Depuis 2011, au travers de cette signature, la Fondation de France explique, exemples à l'appui (dépendance, logement, recherche...), la réalité de ses actions. Car si cette institution, créée en 1969 à l'initiative d'André Malraux pour doter la France d'un outil moderne de philantropie, est aujourd'hui largement connue du public (80% de notoriété assistée), ses missions sont encore mal identifiées. «Notre rôle de passeur entre les donateurs et les associations nous rend moins visibles sur le terrain», explique Agnès Lamoureux, sa directrice de la communication.

Organisme privé financé par les revenus de sa dotation qui s'élève à environ 100 millions d'euros, par la collecte de fonds (12 millions d'euros), les legs et les dotations (50 millions d'euros) et la contribution des fondations, la Fondation de France a deux métiers. Elle abrite d'abord 715 fondations (9 sur 10 émanant de particuliers), soit 40% des fondations existant en France, qui redistribuent plus de 110 millions d'euros par an sur le terrain. Elle mène par ailleurs ses propres actions de soutien à quelque 2 500 à 3 000 associations chaque année pour une valeur moyenne de 25 millions d'euros. Deux missions méconnues.

 

1993, la première campagne  

Hormis lors des premières années de son existence où elle organisa des appels aux dons à la télévision avec le soutien de personnalités comme Romy Schneider, la Fondation n'a guère usé des moyens de communication pour se faire connaître, se contentant d'assumer son rôle de redistributeur de fonds. Non sans succès, elle fut ainsi précurseur sur des sujets émergents comme les crèches parentales dans les années 1970 ou les centres de soins palliatifs vingt ans plus tard lors de l'apparition du sida.

Mais le vote de la loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat va changer la donne en créant un statut pour les fondations avec deux voies possibles: une démarche lourde de reconnaissance d'utilité publique directement auprès des autorités ou le placement sous égide de la Fondation de France. Sans surprise, cette dernière ne tarde pas à accueillir de nombreuses nouvelles fondations. C'est à cette époque charnière que Francis Charhon, ex-président de Médecins sans frontières, est nommé en 1992 directeur général de la Fondation, poste qu'il occupe toujours.

Une nomination qui a pronfondément changé le visage de l'institution. Ses effectifs sont ainsi passés de 35 personnes en 1992 à plus de 160 salariés et plus de 600 bénévoles aujourd'hui, avec un budget de communication de 1,8 million d'euros dont 700 000 euros en achat d'espace (hors marketing direct). Aussitôt installé, Francis Charhon crée en 1993 une direction de la communication qu'il confie à Sophie Duhamel, précédemment passée par la Prévention routière et la Cité des sciences et de l'industrie.

La même année, la Fondation de France signe avec l'agence Hintzy Heymann la première campagne publicitaire de son histoire. Agnès Lamoureux, actuelle directrice de communication de la Fondation, était alors en charge du budget au sein de l'agence. C'est l'époque de la «fracture sociale». Le message est sombre et montre la solitude, l'exclusion et la pauvreté au travers de visuels en noir et blanc signés «Nous aidons ceux qui veulent aider». Un film décline cette campagne l'année suivante avec une voix off sur des images fixes. En 1996, la Fondation enfonce le clou avec une affiche, toujours autour des «bénéficiaires» sur le thème «chaque don est transformé en action». 

 

Les grands donateurs, cibles privilégiées

Deux ans plus tard, l'arrivée de l'agence CLM BBDO marque un tournant plus institutionnel. Autour de l'accroche«Pour qu'une société qui avance ne soit pas une société qui exclut» (signature: «Agissons pour mieux vivre ensemble»), la nouvelle campagne ne montre plus l'exclusion mais joue plutôt le symbolisme avec l'image d'un enfant. Un visuel retouché en 2001 pour «être plus interpelant», sous l'impulsion de la toute nouvelle directrice de la communication Agnès Lamoureux (ex-directrice générale adjointe de DDB & Co). Un film de Raymond Depardon complète le dispositif en faisant de l'accroche la signature de la campagne. 

Dans la foulée de la loi Aillagon du 1er août 2003 sur les déductions fiscales accordées aux mécènes (abattement de 66% pour les particuliers et 60% pour les entreprises), la Fondation adopte en 2004 une orientation publicitaire différente avec une nouvelle agence, Devarrieuxvillaret. Le message ne met plus au centre les bénéficiaires mais les donateurs et notamment les plus contributifs d'entre eux, les CSP+ («Pour agir, votre don est une force»).

Un discours très différenciant à l'époque. «Cette cible est de plus en plus privilégiée par la Fondation de France dont 46% du montant des dons proviennent de 10% des donateurs», explique Agnès Lamoureux à la tête d'une équipe de 10 personnes qui, au-delà de la gestion des relations presse, de la publicité et de la production de contenus print et Web, organise 10 à 15 manifestations par an, en particulier pour ces grands donateurs. Les annonces presse mettent en scène ces derniers et n'hésitent pas à parler argent (patrimoine, leg, investissement...).

Mais parallèlement, la Fondation ne néglige pas le grand public en diffusant un spot réalisé par Claire Denis sur les «sans voix»: «pour aider les personnes en difficulté, il faut d'abord les entendre». Un thème décliné dans la presse par Devarrieuxvillaret au travers de trois portraits loin de tout misérabilisme. 

En 2007, la nouvelle campagne, cette fois conçue par TBWA Corporate Non Profit, se concentre exclusivement sur les grands donateurs («Donnons mais donnons bien»). «Nous avons arrêté la télévision, touchant un public trop large, pour privilégier la radio et la presse», commente Agnès Lamoureux. Jugée maladroite par les autres acteurs du caritatif, l'accroche initiale de la campagne («Je ne donne pas... si je n'ai pas confiance») a dû être abandonnée deux ans plus tard pour laisser place au thème du «plaisir de donner».

Ce n'est donc qu'en 2011 que la Fondation, avec l'agence Euro RSCG C&O, décide de parler dans la presse et à la radio de ses propres actions sur le terrain. A cette prise de parole institutionnelle s'est ajouté bien sûr un volet grands donateurs («Devenez grand mécène!»), conçu par le team créatif Agence Secrète, sélectionné avec le concours de l'agence Limite. Trois portraits signés par le photographe Olivier Roller illustrent cette campagne diffusée via un encart dans une presse très ciblée sélectionnée par l'agence Media Links (Dandy Magazine, L'Eperon, Golf Magazine, les abonnés premium du Figaro...).

Un travail de fond qui semble avoir porté ses fruits: le taux de notoriété spontanée de la Fondation de France est passée de 5% en 2009 à 14% l'an dernier et son taux de confiance est désormais de 75%, la moyenne du secteur des associations étant de 62%.

 

(encadré)

 

Dates et chiffres clés

 

9 janvier 1969. Création de la Fondation de France sous l'impulsion d'André Malraux.

715. Nombre de fondations placées sous l'égide de la Fondation de France.

1993. Première campagne publicitaire «Nous aidons ceux qui veulent aider» (agence Hintzy Heymann).

1998. Campagne «Pour qu'une société qui avance ne soit pas une société qui exclut» (CLM BBDO).

2004. «Pour agir, votre don est une force» (Devarrieuxvillaret).

2007. «Donnons mais donnons bien» (TBWA Corporate Non Profit).

2011. «Les questions de société méritent des réponses» (Euro RSCG C&O).

1,8 million d'euros. Budget de communication (hors marketing direct). 

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