LÉGISLATION

En quelques jours, de nombreuses administrations officielles occidentales ont interdit à leurs employés d’utiliser l’application de vidéo sur leur téléphone. Les autorités craignent que la Chine, via TikTok, puisse avoir accès aux données d’utilisateurs du monde entier. Retour sur un emballement.

En novembre 2022, TikTok avait reconnu que certains employés en Chine pouvaient accéder aux données d’utilisateurs européens, et avait admis un mois plus tard, que des employés avaient utilisé ces données pour traquer des journalistes. Mais le groupe nie fermement tout contrôle ou accès du gouvernement chinois à ses données.

En réponse, une loi avait été ratifiée en janvier aux États-Unis, interdisant aux fonctionnaires fédéraux de posséder l’application sur leur téléphone. Le 27 février, le Bureau de la gestion et du budget à la Maison Blanche a ordonné, en vertu de cette loi que les agences fédérales américaines s’assurent que leurs appareils ne sont plus dotés de l’application chinoise sous 30 jours. L’interdiction ne s’applique pas aux entités américaines ne dépendant pas du gouvernement fédéral, ni aux millions de particuliers qui utilisent TikTok. Mais l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) a déploré cette loi, en estimant qu’elle revenait à « interdire effectivement TikTok ». « Nous avons le droit d’utiliser TikTok et d’autres plateformes pour échanger nos pensées, nos idées et nos opinions avec des personnes du pays et du monde entier », a déclaré Jenna Leventoff, conseillère politique principale de l’ACLU, dans un communiqué.

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Jeudi 23 février, La Commission européenne avait annoncé elle aussi interdire l’usage de l’application TikTok sur les appareils professionnels de son personnel afin de « protéger les données » de l’institution. Cette « suspension » du populaire service de partage de vidéos « vise à protéger la Commission contre les cybermenaces […] Il est de notre devoir de réagir le plus tôt possible aux cyberalertes potentielles », avait indiqué l’exécutif européen.

La veille, le Canada avait lui aussi annoncé bannir l’application des mobiles qu’il fournit à son personnel évoquant « un niveau de risque inacceptable », et lançant une enquête pour établir la conformité de l’application avec les lois canadiennes.

Le 28 février, c’est le Danemark qui a annoncé avoir demandé aux députés et à l’ensemble de ses personnels de supprimer l’application des appareils professionnels à cause du « risque d’espionnage ».

Rappelons que l’Inde a déjà interdit l’application depuis 2020.

Réaction cinglante de la Chine

Selon la correspondante Tech de Politico à Bruxelles, des évaluations sont toujours en cours à Paris, en Belgique et en Estonie, concernant la dangerosité de TikTok et avant une éventuelle interdiction auprès des fonctionnaires. La Pologne, elle, a demandé à la Commission européenne la documentation technique qui avait motivé sa décision.

La Chine ne reste pas silencieuse face à cette accélération dans la perception de son application fétiche. « Nous pensons que cette suspension est malavisée et fondée sur des conceptions fondamentalement erronées. Nous sommes surpris que la Commission ne nous ait pas contactés directement, ni ne nous ait donné l’opportunité de nous expliquer, avait déploré TikTok après la décision européenne. Nous avons sollicité une réunion afin de rétablir la vérité et expliquer comment nous protégeons les données de 125 millions d’utilisateurs à travers l’Europe, qui viennent sur TikTok chaque mois ».

Aux États-Unis, la réponse a été plus cinglante de la part des autorités chinoise, cette fois. « Les États-Unis sont le plus grand pays au monde et ils craignent une application appréciée des jeunes. C’est vraiment un manque de confiance en soi, a réagi mardi Mao Ning, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Nous nous opposons fermement à ce comportement des États-Unis qui consiste à étendre de manière démesurée le concept de sécurité nationale, à abuser du pouvoir de l’État et à s’en prendre de manière déraisonnable aux entreprises d’autres pays ».

Derrière, l'enjeu est aussi économique. Des entreprises suivront-elles le mouvement allant interdire à leurs employés de posséder l'application ?

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