Portrait
Le changement d'échelle n'effraie aucunement le designer français Patrick Jouin. Depuis plus de vingt ans, il collabore avec Alain Ducasse pour l’aménagement de ses restaurants, mais aussi avec JCDecaux pour la conception de mobilier urbain. Retour sur une histoire de succès… hétérogènes.

On lui doit des travaux tour à tour monumentaux ou simples, accessibles à tous, tels que les abribus pour JCDecaux, les sanitaires de la ville de Paris, les Vélib’, ou encore les distributeurs de gel hydroalcoolique. « J’essaye de ne pas avoir de style, je ne cherche pas à avoir une signature qui soit reconnaissable. Ce qui m’excite, ce sont les contraintes », sourit le designer Patrick Jouin, qui est entré à 20 ans à l’école supérieure nationale de création industrielle. « J’ai été votre plus jeune abonné, se souvient-il. À 14 ans je rêvais d’être publicitaire et pour mon anniversaire, j’ai reçu un abonnement à Stratégies, que je lisais de bout en bout. » 

« Le meilleur designer du monde »

C'est finalement un autre métier créatif qui l'emporte. Avec des choix éclectiques. « Mon rapport à la création est survenu très tôt et de manière naturelle car j’ai toujours aimé dessiner, se remémore-t-il. Mais je ne crois pas du tout au talent, je ne crois qu’en la passion. Plus on aime, plus on pratique, plus on progresse. » Ses premières armes, il les fait au sein de la Compagnie des wagons-lits, en tant que designer d’intérieur de train. Puis, il répond à une annonce de Philippe Starck dans Libération qui cherchait « Le meilleur designer du monde ». Il est embauché pour intégrer la cellule design de Thomson, puis l’agence Starck en tant que responsable du mobilier. « Au côté de ce grand designer, j’ai appris à avoir confiance en moi », confie-t-il.

À 30 ans, il se lance de ses propres ailes grâce au dispositif VIA (Valorisation de l'innovation dans l'ameublement) qu’il remporte pour sa chaise «Facto». Un tremplin qui lui fournit beaucoup de visibilité. Le vent en poupe, il expose ses premiers prototypes au salon Satellite de Milan, réservé aux jeunes designers. Et c’est en 1998 qu’il fonde sa propre agence.

Étincelles

Parallèlement, il rencontre trois personnalités décisives. Avec le chef cuisinier Alain Ducasse, « un designer refoulé », il noue une solide relation « qui a tout de suite fait des étincelles » et enchaînent les collaborations démesurées : le Plaza Athénée à Paris, le Spoon Byblos à Saint-Tropez ou encore le Jules Verne au second étage de la Tour Eiffel.

La deuxième rencontre est Patrick le Quément, directeur du design chez Renault. « Il a répondu à l’un de mes articles où je critiquais le monde de l’automobile pour son manque de poésie. Il m’a défié de concevoir un prototype de véhicule haut de gamme », se souvient-il. Dès 2000, le designer se rapproche de l’architecte Sanjit Manku, avec qui il s’associe en 2006. Les projets de plus ou moins grande ampleur se succèdent et l’agence grandit. À la fois sur la partie design industriel et architecture d’intérieur. « J’aime beaucoup le côté recherche et je me passionne pour les nouvelles technologies. En 2004, je découvre l’impression 3D, cela m’a fasciné au point de m’empêcher de dormir la nuit. » Toujours en éveil. 

Parcours :

1992. Diplomé en design industriel à l’Ensci-Les Ateliers.

1998. Création de l’agence de design Patrick Jouin iD.

2004. Lancement de la collection Solid (impression 3D).

2006. Création de l’agence d’architecture d’intérieur Jouin Manku avec son associé Sanjit Manku.

2015. L’agence Patrick Jouin iD se voit confier le design des équipements et des mobiliers des futures gares du Grand Paris Express.

2017. Promu officier de l’ordre des Arts et des Lettres.

2019. Présentation du prototype Tamu, première chaise pliable, imprimée en 3D, qui utilise le moins d’espace et de matière possible pour être fabriquée.

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