Culture
Malgré le contexte, David Nouaille, le directeur général adjoint en charge du marketing et de la communication du Puy du Fou, croit en la capacité de résilience de la société pour reprendre une activité normale.

Difficile de commencer cette interview sans aborder la polémique liée à la dérogation accordée au Puy du Fou pour recevoir 9 000 personnes pour la Cinéscénie. Comprenez-vous les critiques qui vous ont été faites ?

David Nouaille. Je comprends que cela ait pu surprendre dans le contexte actuel, où des pans entiers de l’économie, à commencer par l’événementiel, la culture et le spectacle vivant, sont sinistrés et où chacun essaie de sauver ce qui peut l’être. Mais je tiens à rappeler une fois encore que nous n’avons fait que respecter les règles en vigueur au moment des faits et nous n’avons bénéficié d’aucun passe-droit. Pour rappel, notre demande de dérogation avait été déposée pour le 15 août qui, à l’époque, marquait encore la fin de la limite de jauge maximale à 5 000 spectateurs pour les événements. N’importe quel autre organisateur d’événement pouvait donc adresser une telle demande. Le 10 août, la préfecture nous a officiellement donné l’autorisation pour cette seule date et ce n’est que le 11 août que Jean Castex a annoncé qu’il prolongeait l’interdiction jusqu’à la fin octobre. Raison pour laquelle nous sommes depuis revenus à une jauge de 5 000, mais nous déposons chaque semaine une nouvelle demande de dérogation.

Les 13 069 billets pour la Cinéscénie sont généralement vendus avant le début de la saison : comment gérez-vous les 8 069 visiteurs qui viennent au parc mais ne peuvent assister au spectacle ?

Nous devons gérer des annulations parfois une semaine avant la date. C’est délicat mais les visiteurs font preuve de compréhension. Nous les orientons vers d’autres spectacles, comme « Les noces de feu ». La Cinéscénie étant la seule enceinte du parc à dépasser la jauge des 5 000, il n’y a donc pas de problème pour les autres animations et activités.

Le parc fermera ses portes à la Toussaint : quelle est la situation à date ?

La destination Puy du Fou a été bonne mais la fréquentation du parc est en baisse de 70 % du fait de la combinaison entre l’ouverture tardive, les annulations de dates de Cinéscénie, l’inquiétude des Français ou encore le traumatisme du confinement. La situation est toutefois redevenue proche de la normale pendant l’été sur certaines dates en août, mais 2020 restera pour nous, comme pour tout le monde, une année noire. D’autant plus pour nous, puisque 2020 était une année record en termes d’investissement avec 62 millions d’euros, soit la moitié de notre chiffre d’affaires !

Nous nous sommes bien sûr posé la question de prolonger l’ouverture du parc jusqu’à la fin de l’année, mais compte tenu de la météo et du fait que nos spectacles se jouent en extérieur, nous avons écarté l’idée. Nous avons simplement ajouté deux dates en septembre pour la Cinéscénie, tout en étant conscient qu’à 5 000 places contre 13 000, l’événement n’est pas viable dans la durée.

Que couvre l’investissement de 62 millions d’euros que vous avez évoqué ?

Il a d’une part financé l’ouverture d’un nouvel hôtel (4*) de 96 chambres, le Grand Siècle, dont l’architecture du xviie s’inspire du château Marly (détruit pendant la révolution). Ce sixième hôtel nous permet de compléter la capacité d’hébergement du parc qui atteint désormais 500 chambres pour 2 500 lits. L’autre investissement important est le Théâtre Molière, un centre de congrès adossé à l’hôtel dont il garde le style. Nous recevions déjà près de 200 événements par an, mais il nous manquait un outil polyvalent, compact et bien équipé pour être en phase avec la demande des entreprises. C’est chose faite avec cet espace de 3 500 mètres carrés comprenant un auditorium de 500 places, 11 salles modulables de 40 à 250 métres carrés et un grand foyer d’accueil polyvalent.

Cette infrastructure n’est-elle pas surdimensionnée pour le parc, dont la clientèle affaire est plutôt locale ?

Non, car les investissements réalisés nous ont permis de faire évoluer notre offre qui s’adresse désormais à toutes les entreprises de France et des pays voisins. Nous ciblons toutes les grandes métropoles situées à moins de 2 h 30 par train, autoroute ou avion. Si 2020 ne permet pas d’évaluer avec fiabilité le succès de notre offre, nous enregistrons de plus en plus de sollicitations, ce qui est très encourageant. Même si toutes les tensions économiques et sociales liées à la situation actuelle n’aident pas les entreprises à retrouver toute leur sérénité, elles ont conscience de la nécessité de se rencontrer pour réfléchir, créer, avancer…

Comment les contraintes sanitaires ont- elles impacté l’organisation ?

Tout a été bouleversé. Toutes les mesures sanitaires mises en place pour les spectacles ont changé la donne, remettant en question le protocole d’accueil du public, mais aussi la manière de travailler des acteurs. Nous avons par exemple conçu des masques thématisés avec les costumes ou des masques dont la partie basse se fond avec le visage.

Nous aurions pu décider de mettre tout le monde au chômage partiel, mais nous avons préféré relancer une dynamique en investissant 500  000 euros pour mettre en place les mesures sanitaires (signalétique, équipements, formation, etc.). Nous avons également dû recruter des équipes supplémentaires, alors que l’activité était inférieure. Nous assumons cette double peine.

Pensez-vous que l’impact de la crise sanitaire soit irréversible ?

Nous croisons les doigts pour qu’un vaccin soit rapidement trouvé car plus nous attendrons, plus la crise marquera les esprits et les process. Nous nous préparons déjà à l’idée que la situation puisse durer, à l’idée qu’il va nous falloir trouver en permanence des solutions. Nous ne pourrons pas tout arrêter comme nous l’avons fait pendant des semaines, des mois, voire années à cause d’un virus. Chacun va devoir apprendre à vivre avec, à se laver les mains, à garder ses distances ou, lorsque cela s’avèrera impossible, à trouver une alternative.

Dans tous les cas, je pense que nous reviendrons à une situation normale en termes d’activité car maintenant nous connaissons et maîtrisons le protocole. Nous sommes prêts à affronter une nouvelle crise. Ce qui sera irréversible, c’est le nombre d’entreprises qui resteront sur le tapis dans les mois à venir.

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