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Que ce soit pour Back Market il y a presqu'un an ou pour Transavia à partir du 20 février, l'agence Marcel est une habituée des techniques de détournement à des fins publicitaires. Explications avec Ghislain Tenneson, son chief strategy officer.

Qu’est-ce que vous appelez la culture du hack ?

Ghislain Tenneson : C’est une pratique de communication qu’on affectionne particulièrement à l’agence. Elle consiste à utiliser, pour une opération marketing, la force d’un adversaire contre lui. C’est un peu une technique issue des arts martiaux, comme le judo ou le taekwondo. En gros, on utilise la force, la puissance de l’adversaire contre lui. Quand je parle d’adversaire, c’est un grand mot, parce qu’on n’a pas forcément besoin d’un adversaire pour le faire et ce n’est pas forcément des personnes identifiées ou des marques concurrentes identifiées. Ça peut aussi jouer avec des habitudes culturelles et les détourner pour leur faire dire autre chose. Pour faire plus court, la culture du hack, c’est clairement un moyen alternatif et courageux de faire parler de la marque.

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Vous avez des exemples ?

Nous avons par exemple utilisé les armes d’Apple dans la campagne «Hack Market», pour Back Market, en avril 2022. On a «hacké» les Apple Stores en utilisant Air Drop, qui est la technologie de la marque. À chaque fois qu’une personne achetait l’un de ses produits, une courte vidéo apparaissait avec des messages comme : «Nous vendons le même modèle mais avec moins d’empreinte carbone», de sorte à les inciter à passer au reconditionné. On a utilisé des moyens qui nous étaient ouverts et qui étaient disponibles pour faire passer un message. On n’a pas fait de concurrence déloyale.

Ce sont des actions qui demandent un certain courage. Évidemment, tout ce qui a été fait a été préparé avec un avocat et on a été conseillé. On a adapté les messages de manière à ne pas se faire attaquer. L’agence n’y va pas la fleur en fusil en se disant advienne que pourra.

Avant «Hack Market», on a travaillé avec Heetch, en 2021, sur une campagne qui détournait les livraisons Uber Eats. On a travaillé avec plusieurs restaurateurs qui sont référencés sur la plateforme, et on a créé des emballages alimentaires aux couleurs de Heetch, sur lequel on délivrait des messages, du genre : «Mangez à l’américaine, déplacez-vous à la française». Donc au final, c’est un livreur Uber Eats qui transmettait involontairement le message pour Heetch.

Quel est votre prochain coup ?

Nous avons utilisé cette méthode du hack dans notre dernière campagne pour Transavia [qui sort ce lundi 20 février]. L’opération de la compagnie aérienne, qui s’intitule #AirplaneCelebration, est beaucoup plus axée sur le gaming et les jeux de foot. Transavia, qui dessert plus de 100 villes en Europe, va mettre au défi les gamers en les invitant à se prendre en photo en train de faire la «célébration avion» après avoir marqué un but. Si l’équipe avec laquelle il vient de marquer est desservie par la compagnie, ils peuvent gagner un aller-retour pour deux personnes vers cette destination. Donc là, c’est vraiment une culture qui est hackée. Quatre influenceurs sur Twitch vont tenter de relever le challenge ce lundi soir.

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Qu’est-ce que la culture du hack apporte aux consommateurs par rapport à de la publicité classique ?

C’est très conversationnel, le consommateur est exposé à ça de manière beaucoup plus naturelle. Vu que ce sont des campagnes qui sont assez audacieuses, elles sont reprises dans les médias et par conséquent, c’est une manière complètement différente de découvrir le message de la marque, et ça lui donne plus de crédibilité. Le fait que ce soit un influenceur ou un journaliste qui vous parle de l’action de la marque, c‘est plus fort, plus impactant.

L’influence est une dimension aussi importante que le contenu lui-même. Lorsque vous rentrez en confrontation avec une personne, si vous êtes tout seul à défendre votre point de vue, vous avez quasiment perdu. Il faut que vous ayez des supporters, pour que ce soit eux qui disent : «Regardez ce qu’ils ont fait. C’est vachement bien. Regardez, ils ont eu le courage d’aller défier Apple, ils ont eu le courage d’aller défier la loi.»

Le 11 avril, vous organisez une conférence sur le sujet au Campus Publicis Bastille, Place des Génies. Quel est l'objectif de cet événement ?

L'idée est de donner envie à nos marques, partenaires et prospects de se laisser tenter par la culture du hack, de leur donner un peu ce goût du risque, en leur disant : «devenez des hackers». Ce n'est pas uniquement pour le plaisir de sortir des belles idées et de se faire peur, mais aussi pour leur démontrer qu’ils ont tout intérêt à le faire, parce que s’inspirer de cette culture, c’est véritablement efficace. Il suffit juste de trouver les bons sujets et les bons «antagonistes».

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