TRIBUNE

[Tribune] Parmi la trentaine de marques passées au crible dans les secteurs de la bancassurance, des cosmétiques, du luxe et de la grande distribution, le cabinet de conseil fondé par Jeanne Bordeau met en lumière les bonnes pratiques de langage des marques.

Parmi les bonnes pratiques des marques dans le langage qu'elles utilisent dans leur communication, l’identité est un socle à travailler. Pour se relier à son client, la marque choisit en effet de parler et d’écrire en campant une posture responsable, c’est-à-dire une posture qui fait face. Être un énonciateur qui se définit bien y aide.

Par exemple, pour fêter ses 16 ans d’existence, la Banque Postale s’identifie aux jeunes et à leurs aspirations : «Avoir 16 ans aujourd’hui, c’est être né avec le digital. Avoir 16 ans aujourd’hui, c’est se dire que l’environnement c’est pas une option. Avoir 16 ans aujourd’hui, c’est être solidaire…» Par analogie, ces phrases définissent la banque qui s’offre ainsi un formidable rajeunissement.

Tata Harper, fondatrice de la marque éponyme de cosmétiques de luxe certifiés bio, veille à faire vivre la marque en s’impliquant personnellement avec son client. Elle fait elle-même des tutoriels, anime des masterclass. Ses collaborateurs prennent eux aussi la parole.

La clarté, une attitude obligatoire

RSE oblige, les marques cherchent plus que jamais à apporter des preuves pour fonder leur authenticité, et camper une attitude citoyenne. Elles s’expliquent en continu. La pédagogie est la grande tendance gagnante et les marques cherchent des preuves, des faits, des exemples pour créer un récit fiable, irriguer loyauté et vérité de leurs comportements. 

Ainsi Matmut donne l’exemple de son initiative d’inclusion dans et par le sport avec son projet le «Sport TRES collectif». Une appellation claire et éloquente. C’est qui le patron ?! démontre par étape «comment créer un produit solidaire collectivement». Et tout cela en utilisant une langue naturelle et enjouée, les marques ne veulant pas être «donneuses de leçon» car la pédagogie, pour elles, est là aussi pour faciliter l’expérience client.

De plus, il faut être «utile» et le conseil monte aussi en puissance. Les marques veulent aider leurs consommateurs. Dans Snapchat, on vit en communauté, on partage des conseils, les avis des amis, la tech accompagne le parcours d’achat, on teste, on découvre, on essaie. En tous points, l’expérience client s’élargit.

Ce qui compte dans ces opportunités de rencontres avec la marque, c’est que le client passe de plus en plus de temps avec elle. Et justement, si la marque éclaire sur son identité, c’est parce que ses communautés vont échanger entre elles et qu’à une époque où l'on demande à la marque d’être responsable, ses propos peuvent être décontextualisés. La notion de service se sophistique, le Web3 rend le client responsable et la marque est plus que jamais de son côté aussi engagée. Le langage reste une épée qui peut vous servir ou se retourner contre vous.

Un ton de marque à mieux chorégraphier

Son, textes et images reliés sur la forme, c’est pour les marques un jeu d’enfant. En effet, avec le Web3, elles déploient avec justesse toutes les formes d’expressions hybrides. Caudalie et Tata Harper savent jouer avec TikTok. Mais les uns et les autres développent-ils leur ton ? Pas forcément !

En termes de qualité du langage, et sur le fond, on note un vocabulaire assez décevant, des mots peu distinctifs, qui ne caractérisent pas les engagements des marques. De plus, penser à placer un langage au juste ton dans les vidéos et autres podcasts ou outils sonores reste un exercice oublié.

Et quand des tentatives stylistiques ont lieu, elles sont tour à tour déployées par des questions, des analogies, des comparaisons. A remarquer que certaines manient la nuance avec talent. Roger&Gallet par exemple parle de ses concurrents sans être accusateur. Pour évoquer les tentatives d’imitation de la célèbre Eau de Cologne, Roger&Gallet parle «d’une ribambelle de faux descendants qui se disputent sa paternité». Jolie trouvaille !

Attention, l’obsession de la pédagogie ne doit pas tamiser la créativité ni le maniement subtil des mots. Enfin, la cohérence linguistique doit se diffuser dans le son, le texte et l’image, c’est un tout indissociable.

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