TRIBUNE

[Tribune] Avec l'arrivée des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, les marques pourraient être tentées de mener des opérations d'ambush marketing sans être partenaires officiels des Jeux. Une stratégie qui pourrait leur coûter cher.

Avec près de 13 millions de spectateurs sur sites et plus de 4 milliards de téléspectateurs à travers le monde attendus pour Paris 2024, les Jeux sont de loin le plus grand évènement sportif mondial et le plus emblématique. Une partie significative du financement des Jeux de Paris 2024 sera assurée par les partenaires officiels, qui peuvent donc associer leurs propres marques et actifs de propriété intellectuelle aux assets extraordinaires que sont les propriétés olympiques et paralympiques.

Le Comité d’organisation des jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 (Cojo) a notamment pour mission d’organiser, de planifier et de financer les Jeux olympiques et paralympiques. Doté d’un budget d’un peu plus de 4 milliards d'euros, provenant à 96% de ressources privées, celui-ci tirera une source majeure de son financement des revenus liés à la vente des droits commerciaux (partenariats et licences notamment). Ceux-ci sont principalement basés sur des accords de licence et/ou d’association de marques avec les Jeux olympiques et paralympiques, via des accords de partenariats.

Les différents partenaires et supporters officiels de Paris 2024 pour le territoire français, au nombre de 35 à ce jour, en plus des partenaires mondiaux du Comité international olympique (CIO), bénéficient du droit exclusif d’utiliser les propriétés olympiques, en vue de s’associer aux Jeux de Paris 2024. Les propriétés olympiques sont elles-mêmes définies par la Charte olympique, comme les anneaux, l’emblème des Jeux, l’hymne, le nom de la ville organisatrice et son millésime.

Une veille permanente

Mais chaque Olympiade permet de le constater : nombre d’entreprises non-partenaires n’hésitent pas à lancer des campagnes publicitaires et de marketing, en particulier sur les réseaux sociaux, portant sciemment et volontairement atteinte aux propriétés olympiques et paralympiques. Opérations «apér’olympique», «olympiades des prix», déclinaisons des anneaux olympiques sous diverses formes, messages de soutien – dans un contexte commercial – à des athlètes en utilisant des hashtags tels que #jeuxolympiques, #paris2024, #olympics ou encore des codes promotionnels, jeux concours ou cadeaux en référence aux Jeux sont autant d’opérations marketing qui contreviennent à la loi.

La garantie de l’exclusivité de l’utilisation des propriétés olympiques et paralympiques par les partenaires officiels est donc indispensable et oblige tant Paris 2024 que le CIO a une veille permanente, sur les réseaux et en physique, car la tentation des sociétés non-partenaires d’utiliser sans autorisation, de s’associer sans droit, d’imiter les propriétés olympiques et paralympiques et/ou de surfer sur la vague de Paris 2024 est évidemment grande.

Appelée «marketing d’embuscade» (plus connu sous l’anglicisme «ambush marketing»), cette stratégie de communication vise à profiter indûment, sans bourse déliée, des retombées médiatiques et économiques entretenues par les efforts et les investissements des organisateurs des Jeux et des partenaires officiels.

L’extraordinaire protection des propriétés olympiques et paralympiques

En France, les propriétés olympiques et paralympiques sont notamment protégées par les dispositions des articles L141-5 et L141-7 du Code du sport, qui confèrent une protection spéciale et exceptionnelle aux «emblèmes, drapeau, devise et symbole olympiques et paralympiques, hymne olympique, logo, mascotte, slogan et affiches des Jeux olympiques, du millésime des éditions des Jeux olympiques "Ville + Année", des termes "Jeux Olympiques", "olympisme" et "olympiade", des sigles "JO" et "JP"», mais également des «termes "olympique", "olympien" et "olympienne"» dans un contexte promotionnel ou commercial, ou susceptible d'entraîner une confusion dans l'esprit du public avec le mouvement olympique.

Toute reproduction, imitation ou modification de ces propriétés olympiques et paralympiques expose son auteur aux sanctions prévues par le Code de la propriété Intellectuelle.

L’ambush marketing est, quant à lui, sévèrement sanctionné par les tribunaux français sur le terrain de la responsabilité civile prévue à l’article 1240 du Code civil et du grief de la concurrence déloyale et parasitaire. Ainsi que le rappellent régulièrement les juges, «le propre de la responsabilité civile est de rétablir, aussi exactement que possible, l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu, sans perte ni profit pour elle».

Légitime jouissance des partenaires officiels

De fait, tout agissement visant à reproduire ou imiter les emblèmes et/ou autres symboles des Jeux, en particulier à des fins commerciales, ou à s’y associer directement ou indirectement sans autorisation obligera le Cojo à intervenir immédiatement. Le Cojo pourra même engager, lorsque cela sera nécessaire, des actions judiciaires qui sanctionneront durement ces atteintes et entraineront la réparation du préjudice subi et partant, le versement de dommages-intérêts particulièrement élevés et l’on peut l’espérer, dissuasifs.

Car, rappelons-le, l’organisation des Jeux ne peut se faire sans les partenaires officiels qui s’associent au mouvement olympique et aux jeux olympiques et paralympiques en payant justement pour bénéficier d’une exclusivité d’utilisation des propriétés olympiques en lien avec leurs produits et services, et parce qu’ils partagent les valeurs du sport, celles diffusées par les Jeux. Le rôle du Cojo est donc de leur assurer une légitime jouissance paisible de celle-ci.

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