Audiovisuel
Face au succès des plateformes de SVOD, les chaînes télé expérimentent de nouvelles fenêtres en amont de la diffusion antenne. Un pari qui peut se révéler payant.

La patience n’est pas toujours la qualité première des amateurs de séries. Encore moins dans un monde où Netflix les a habitués à disposer de la totalité des épisodes dans une logique de binge watching. Partant de ce constat, de plus en plus de chaînes testent de nouvelles fenêtres de diffusion pour leurs fictions, en amont de leur diffusion antenne. C’est ce qu’on appelle le pré-broadcasting ou le preview, qui consiste à proposer sur ses plateformes numériques un ou plusieurs épisodes d’une série en avant-première. « Ça permet d’adresser des publics différents, mais c’est encore une pratique limitée, qui est liée aux modalités de financement des contenus », explique Julien Rosanvallon, directeur exécutif télévision et internet chez Médiamétrie.

Une nouvelle fenêtre d'exploitation

Au Royaume-Uni, à la pointe sur cette nouvelle fenêtre d’exploitation, le pré-broadcasting représente en moyenne 21 % de l’audience totale d’un programme lorsque cette fonctionnalité est proposée, selon Eurodata TV. Pour une série comme Killing Eve, dont tous les épisodes ont été mis à disposition sur BBC iPlayer dès la diffusion du premier épisode sur BBC2 le 15 septembre dernier, ce taux est même monté à 37 %, davantage que l’audience live (29 %) ou le replay (25 %).
En France, Canal+ propose depuis cinq ans déjà, dans MyCanal, tous les épisodes d’une saison dès le coup d’envoi de sa diffusion à l’antenne. Dans le cas de la saison 4 du Bureau des légendes par exemple, 61 % de l’audience du dernier épisode s’est fait en amont de la diffusion antenne (26 % en live, 13 % en replay), selon Médiamétrie. « C’est une stratégie déployée par les acteurs de pay-TV, qui veulent s’aligner sur les services de SVOD. Pour les chaînes gratuites, le preview peut représenter une nouvelle fenêtre d’exclusivité, une fenêtre payante pour ne pas risquer de cannibaliser les audiences linéaires », note Reef Read, manager au sein du pôle Culture et Média du cabinet de conseil en stratégie PMP.

Effet bouche-à-oreille

Depuis le lancement en 2016 de la série La Vengeance aux yeux clairs, TF1 propose ponctuellement ce type de dispositif. En novembre dernier, le premier épisode de La Vérité sur l’affaire Harry Quebert, diffusé en avant-première sur MyTF1 Premium (proposé aux clients des FAI avec qui TF1 a signé des accords de diffusion), a ainsi totalisé 334 000 visionnages avant sa diffusion antenne (5,7 millions de téléspectateurs en audience veille). En août, le premier épisode de Good Doctor avait, lui, été vu 438 000 fois en avant-première. « Ce mode de diffusion participe au bouche-à-oreille pour la promotion de la diffusion linéaire, tout en s’adaptant aux nouvelles habitudes de consommation du public », indique-t-on chez TF1.
Un effet bouche-à-oreille que relève aussi Arte. Après les séries Ad Vitam, Il Miracolo et Au nom du père en 2018, la chaîne mettra en ligne l’ensemble de la saison de Jeux d’influence dès la diffusion du premier épisode en juin prochain. « Le preview n’est pas comptabilisé dans les parts d’audience des chaînes, ce n’est pas l’enjeu pour nous. L’objectif de ce type d’expérimentation est d’aller chercher les téléspectateurs où ils sont », insiste Alexandre Piel, directeur adjoint de la fiction d’Arte France. Et dans ce domaine, tous les tests sont bons.

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