Audiovisuel
Que ce soit dans la scénographie ou dans les technologies utilisées, les programmes audiovisuels s’ouvrent de plus en plus à l’univers du jeu vidéo, avec pour premier objectif d’attirer des téléspectateurs plus jeunes.

Une zone ultra-sécurisée infestée de zombies, des candidats qui doivent défendre leur vie pour tenter de dérober la fortune d’un scientifique un peu fou, des épreuves dont le niveau de difficulté augmente à mesure que l’on avance dans le jeu : bienvenue dans District Z, le nouveau jeu d’aventure de la chaîne TF1, dont la diffusion débute vendredi 11 décembre. Produit par la société de production d’Arthur, Satisfaction - The Television Agency, et présenté par Denis Brogniart, ce nouveau programme se donne pour ambition de renouveler les codes des émissions d’aventure.

Logique de jeux

Parmi ses sources d’inspiration, la série The Walking Dead, des programmes pour enfants comme Vampirina et Scooby-Doo, mais aussi l’univers du jeu vidéo, de Resident Evil à Luigi’s Mansion. « Les jeux vidéo ne sont pas des références dont nous devons avoir peur. Tout le monde joue aujourd’hui, que ce soit la génération des gamers des années 80 qui aujourd’hui devient parent, ou des non-gamers qui s’initient par le smartphone », relève Julien Degroote, directeur adjoint des programmes de flux du groupe TF1.

District Z est loin d’être le seul programme à s’inspirer de l’univers du gaming. L’émission Ninja Warrior par exemple, également diffusée sur TF1, reprend la logique des jeux de plateforme avec un parcours rempli d’obstacles à terminer le plus vite possible, filmé sur le côté, en travelling.

Dans le domaine de la fiction et du documentaire, les projets de collaborations entre les mondes de l’audiovisuel et du jeu vidéo se sont aussi multipliés ces derniers mois. Netflix prépare avec Ubisoft plusieurs séries déclinées du jeu Assassin's Creed ; l’Institut national de l’audiovisuel (INA) s’est associé à l’éditeur du jeu vidéo à succès World of Tanks, Wargaming, pour une série documentaire sur les chars d'assaut, diffusée sur la chaîne Toute l'histoire. Et une autre série documentaire sur les navires de guerre, autour du jeu World of Warships, produite par Le Cinquième Rêve et Wargaming, est en préparation pour une diffusion en 2021 sur Planète+.

« L’utilisation du jeu vidéo à travers des reconstitutions 3D permet de rendre plus ludique et plus moderne le documentaire historique. De plus, il n’existe pas toujours d’images d’archives pour certains événements historiques. Le jeu vidéo permet de recréer des scènes », explique Pascal Portier, responsable des licences et des partenariats chez Wargaming. Depuis plusieurs années, l’éditeur de jeu travaille aussi régulièrement pour le programme Champs de bataille, diffusé sur RMC Découverte. « Dans notre jeu World of Tanks, les chars sont recréés en se basant sur une réalité historique. C’est cette connaissance et ce savoir-faire de reconstitution que nous mettons au service du programme », ajoute Pascal Portier.

Star Academy du gaming

En Espagne, le gaming a même gagné le monde de la télé-réalité, avec Top Gamers Academy, dont la diffusion s’est achevée le 29 novembre sur Neox, la chaîne jeune d’Atresmedia. Produite par Webedia Espagne et Banijay Iberia, l’émission a vu s’affronter durant huit semaines 21 candidats au titre de meilleur joueur de jeu vidéo, une sorte de Star Academy du gaming. En plus de l’émission télé hebdomadaire, un flux vidéo permettait de suivre les candidats en direct sur YouTube et Twitch. « Nous avions envie de faire sortir de YouTube et Twitch les talents digitaux pour essayer de réduire le gap culturel entre parents et enfants », se souvient Antony Dumas, CEO de Webedia Espagne. Le contrat est à moitié rempli : si sur le digital, le bilan est positif, avec 20 millions de vues sur Twitch, 12 millions sur YouTube, les audiences télé sont jugées décevantes (entre 1% et 1,5% de part d’audience). « Nous n’avons pas réussi à drainer les jeunes générations en télé. Nous étions plutôt sur une moyenne d’âge de 35-40 ans », reconnaît Antony Dumas. En France, des discussions sont en cours pour adapter le format en 2021.

Relation ambiguë

Télévision et jeu vidéo sont-ils donc deux mondes à part ? Pour Alexis Blanchet, maître de conférences au département cinéma et audiovisuel de l’université Sorbonne Nouvelle et auteur d’Une histoire du jeu vidéo en France (ed. Pix'n Love), « la télévision entretient une relation ambiguë avec l’industrie du jeu vidéo depuis les années 1980, avec des effets d'aller-retour ». D’un côté, elle s’en inspire, que ce soit à travers l’adaptation en dessin animé de Pac-Man, des jeux interactifs comme Hugo Délire ou des programmes inspirés du jeu vidéo comme Le Chevalier du labyrinthe. De l’autre, télévision et jeu vidéo sont concurrents dans le temps de cerveau disponible des Français. La partie est loin d’être terminée.

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