Médias

Plusieurs éditeurs français renommés ont voulu concurrencer « Jeune Afrique » et voir dans le continent un levier de croissance. Revue de détail de ces diverses offres éditoriales.

- Jeune Afrique, l'historique

Créé en 1960 pour la publication, 2005 pour The Africa Report et 2016 pour le trimestriel Africa Business+ (Jeune Afrique Business+).

Ligne éditoriale et développement : « Jeune Afrique a pour mission d’être la meilleure plateforme d‘info politique et économique sur l’Afrique. Elle s’adresse à ceux qui veulent comprendre l’actu africaine et partager nos valeurs au service d’une Afrique innovante, moderne et reconnue à sa juste place dans le monde », détaille Amir Ben Yahmed, CEO du groupe Jeune Afrique. L’hebdo Jeune Afrique est devenu mensuel en mai 2020. Le tirage est de 50 000 exemplaires. L’audience (site et l’appli) s'élève à 10 millions de visiteurs uniques par mois, 60 % sont issus du continent africain. La marque réunit 7 millions d’abonnés sur les réseaux sociaux. L’équipe est constituée, selon l’éditeur, de 145 personnes en CDI à Paris et 25 collaborateurs en CDI sur le continent africain, salariés d’une filiale. La marque, qui produit sur print, en digital et en vidéo, se distingue par son africanisme historique. « Nous sommes un journal profondément africain, ce qui est un facteur différenciant face à nos confrères français à la recherche d’une audience complémentaire, souligne Amir Ben Yahmed. Notre histoire nous confère une compréhension, une confiance et une influence inégalées. Notre modèle est diversifié, en langue anglaise et française, en print, digital et en vidéo ». Fin 2020, le groupe a néanmoins dû présenter un PSE. Vingt salariés sont partis. Depuis, le CA 2021 est de 20 millions d’euros et 26 millions d’euros sont prévus pour 2022. Le groupe vise les 10 millions d’euros de chiffre d’affaires en abonnés numériques en 2025. Il table sur 3 millions en 2022. Au 1er trimestre 2023, le site et l’appli seront refondus et des podcasts, lancés. La première édition de l’Africa Financial Industry Summit aura lieu les 28 et 29 novembre.

- Le Monde Afrique, l’international

Créé en 2015.

Ligne éditoriale et développement : « Couvrir le continent africain avec toute la diversité de sujets économiques, sociaux, culturels que l’on pourrait avoir dans un média panafricain. Et saisir tous les aspects positifs de la dynamique du continent », résume Hélène Guinaudeau, directrice adjointe à la diversification à l’international pour Le Monde. Cette verticale du site Le Monde affiche 6,5 millions de pages vues par mois. Elle est lue à 75 % en France et à 25 % en Afrique (au Maroc et en Algérie surtout). Sur Facebook, Twitter, YouTube, Instagram, l’audience provient, à 65 %, d'utilisateurs basés sur le continent africain. Quinze personnes à Paris dont douze journalistes s’y consacrent et une vingtaine de correspondants en Afrique avec une présence importante en Côte d’Ivoire, en Algérie, en Tunisie. Soit 35 journalistes pour un effectif total de 520 journalistes au Monde. La production est de huit à dix papiers par jour dont 25 % sont repris dans Le Monde in English. Des partenariats, comme avec la Fondation Gates, permettent de développer des thématiques (santé publique, climat, agriculture) mais sans intervention dans le travail des journalistes. Seul point faible, le business model est encore en construction, le modèle d’abonnement conjoint développé avec Orange en Côte d’Ivoire n’ayant pas encore pris. « On réfléchit à de nouveaux formats vidéo pour les réseaux sociaux et à proposer des événements dans les pays où nous souhaitons élargir nos audiences, donc en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Maroc. L’objectif est de gagner de l’argent via nos abonnements digitaux d’ici cinq ans et de le réinjecter dans les équipes », détaille Hélène Guinaudeau.

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- La Tribune Afrique, l’économique

Créé en 2016.

Ligne éditoriale et développement : La base line de La Tribune résume son projet : « Partager l’économie ». Delphine Chêne, présidente de La Tribune Afrique, complète : « c’est-à-dire décrypter la transformation de l’économie, les grands enjeux d’un développement durable en mettant au centre l’humain et le rôle des entrepreneurs privés ». Pour La Tribune Afrique, cela se traduit par 900 000 followers sur les réseaux sociaux (876 000 sur Facebook, 19 987 sur LinkedIn et 9 238 sur Twitter). L’audience du site est de 600 000 visiteurs uniques mensuels. Basée à Casablanca, l’équipe compte cinq permanents et cinq pigistes auxquels s’ajoutent des correspondants sur le continent africain. Les bureaux de La Tribune en région (Montpellier, Toulon, Marseille…) peuvent aussi contribuer à la production. Il faut compter avec 500 contenus par an, des forums digitaux qui attirent 350 000 à 600 000 vues, une newsletter hebdo B to B qui touche 30 000 contacts et une émission mensuelle Connect Live 54. Une attention particulière est attachée à la thématique des femmes. La Tribune Afrique projette de créer une deuxième édition du Forum Europe Afrique à Marseille le 16 mai 2023. Mais, là aussi, le site qui se propose de traiter « toute l’économie du continent » a peu de moyens humains.

- Le Point Afrique, l’actu qui a du sens

Créé en 2014.

Ligne éditoriale et développement : « Il s’agit de traiter des événements qui ont du sens dans l’histoire contemporaine de l’Afrique, de permettre aux gens d’avoir une information qui exclut les préjugés et qui cerne les défis », explique Malick Diawara, qui dirige le projet depuis le début. L’audience n’est pas communiquée mais cette verticale du site du Point emploie trois journalistes permanents et une quinzaine de correspondants. Ils nourrissent quatre à cinq articles par jour illustrés de vidéos. La force du Point Afrique ? Une bonne couverture du Maghreb et des pays francophones. « Notre objectif est que chaque année, 80 % de ce que l’on a produit puissent servir de documentation à quelqu’un, qui s’intéresse à l’Afrique », ajoute le responsable éditorial. Cependant, la verticale a aussi ses faiblesses : « Nous sommes limités par nos moyens humains », reconnaît Malick Diawara.

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Brut Afrique, un média social qui prend racine

Alors que Brut a fermé ses bureaux au Mexique et en Allemagne et les a revus à la baisse aux États-Unis et en Inde, sa présence en Afrique se confirme nettement. Lancé en mars 2021, Brut Afrique compte dix salariés à Paris et dix en Afrique. Il est dirigé par Haby Niakaté, ex-journaliste du Monde Afrique et de Jeune Afrique et ex-animatrice du talk-show africain 100 % féminin Le Chœur des Femmes sur Canal+. Le média cible comme partout ailleurs les 15-35 ans mais se refuse à donner des chiffres d’audiences. Il produit une dizaine de vidéos de une à douze minutes chaque jour sur ses quatre verticales qui sont dédiées à la florissante Côte d’Ivoire, suivie du Sénégal, de la Tunisie et du Maroc. « Nous ne nous interdisons aucun sujet : cuisine, sexe, beauté, économie... Nous suivons beaucoup les questions féministes et celles liées aux discriminations », souligne la responsable qui avoue bénéficier de l’expérience, du savoir-faire et des process de l’entreprise notamment en termes de montage et d’écriture. « Nous sommes totalement libres et indépendants, ajoute-t-elle. Notre modèle repose sur le brand content avec des vidéos sponsorisées par des marques. Notre plus gros annonceur est Orange ». Parmi les projets du média, se lancer sur TikTok d’ici au mois de décembre 2022.

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