Présidente d’Affi Mobile, Claire Hatem veille sur le parcours d’une centaine de camions dans toute la France. Elle a su s’imposer dans un milieu très masculin.

Quand on lui parle mobilité, elle ne pense pas 4G ou 5G mais camions. Claire Hatem en emploie 80 depuis son bureau de Grenoble, avec les cinq salariés de sa société Affi Mobile. Le concept ? Tout simple : deux affiches de 6 m2 sur les flancs du véhicule qu’il faut savoir mettre au bon endroit en fonction des particularités de l’annonceur. Cet été, la société gère par exemple une campagne dans le Var pour annoncer une série de concerts de village en village. « On est six et on fait travailler une centaine de personnes, constate Claire Hatem. Mes camions sont dispatchés dans différentes entreprises dans toute la France. C’est notre expertise qui permet de déterminer où les placer. »

Carnet de route numérique

Déconnectée ? En fait, cette logique de géomarketing impose à l’employeuse des camionneurs de savoir où se trouve sa flotte. Ses chauffeurs sont donc localisables à tout moment et disposent d’une tablette numérique. Une sorte de « carnet de route » qui permet de prouver que le véhicule est allé dans des endroits fréquentés, et d’avoir une fiche journalière de satisfaction sur la campagne d’affichage comme sur l’état du véhicule. La géolocalisation sert aussi à montrer que le camion va exactement là où l’annonceur veut aller. Coût d’une campagne de quatre jours : 2000 euros.

L’affichage mobile est sans doute le dernier média à ne pas être digital. Le Grenelle 2, en 2015, interdit en effet tout éclairage ou toute numérisation pour cette activité dont Affi Mobile est l’un des deux derniers acteurs. Dans ce métier, pas d’écran donc, on colle et décolle. Claire Hatem se dit « en veille » sur les solutions plus écologiques que le moteur thermique. Elle a recours à deux camions en biogaz, mais elle sait aussi que son unique véhicule électrique lui imposait de faire appel à un transporteur diesel. Un peu hypocrite… Les grandes agglomérations deviennent aussi, de plus en plus, un vrai casse-tête avec leurs zones à faibles émissions de CO2. Il a fallu s’adapter et nouer un accord avec les triporteurs qui passent là où les camions de livraison n’entrent plus. Demain, peut-être l’hydrogène ?

Mariée et mère d’un enfant adopté de 14 ans, la cheffe d’entreprise a l’habitude de prendre son risque. Lorsqu’elle rachète, en empruntant, la société qui l’emploie, en 2014, cette native d’Avignon est depuis dix ans à Grenoble. Elle vient de passer vingt ans à Lyon, dans une entreprise de transport international routier, vite reprise par Bolloré. Assistante trilingue, elle devient chef de service dans l’affrètement et passe 80 % de son temps à discuter en anglais ou en allemand. Difficile d’être une femme dans ce milieu très masculin ? « Dès lors que la parole est juste et honnête, peu importe le sexe », répond-elle. Elle en a aussi retenu des leçons pour la vie : « Si tout le monde se respecte, il n’y a pas de problème. Les gens irrespectueux sont toxiques. C’est à la fois évident et compliqué à faire comprendre. »

Parcours

1983. Deug d’anglais après un BAC B, CAP sténodactylo.

1998. SCAC, employée au service d’affrètement international puis responsable de lignes.

2004. DSV Transport, responsable du service national.

2005. Présidente-directrice d’Affi Mobile.

2013. Lauréate du réseau Entreprendre.

2023. Engagée dans la Convention des entreprises pour le climat.