Audiovisuel

La suppression de la redevance audiovisuelle et son remplacement par un autre mécanisme de financement constitueront le premier chantier majeur de la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul Malak.

Volonté d'augmenter le pouvoir d'achat d'une part, craintes sur l'avenir de l'audiovisuel public de l'autre: la suppression de la redevance et son remplacement par un autre mécanisme de financement constitueront le premier chantier majeur de la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul Malak. Tour d’horizon des enjeux soulevés par une disparition promise par le Président réélu Emmanuel Macron.

Quand la redevance sera-t-elle supprimée ?

Promesse de campagne d'Emmanuel Macron avant sa réélection à la présidence de la République en avril, la contribution à l'audiovisuel public ou redevance télé, sera supprimée dès cette année, avait annoncé le gouvernement sortant mi-mai. Le ministère de l'Économie avait alors indiqué que l'objectif était d'entériner cette suppression via le projet de loi de finances rectificative qui sera présenté après les élections législatives de juin. Jusque-là, la redevance était payée tous les ans, en même temps que la taxe d'habitation, déjà supprimée pour une majorité de Français avant sa généralisation. Avec cette suppression, Emmanuel Macron a assuré vouloir «redonner du pouvoir d'achat» aux Français. La redevance se monte à 138 euros en métropole et 88 euros outremer. Elle ne concerne que les foyers qui détiennent un téléviseur: les autres ne la payent pas, même s'ils regardent des programmes sur ordinateur, tablette ou smartphone. Pour l'année en cours, elle a rapporté 3,2 milliards d'euros, pour un total de 3,8 milliards versés à l'audiovisuel public: l'État a ajouté 600 millions d'euros pour compenser le non-paiement de la redevance par les ménages aux revenus les plus faibles.

Quelle est son utilité ?

Créée en 1933 -elle concernait à l'époque les postes de radio, la redevance est la principale source de financement de l'audiovisuel public qui rassemble France Télévisions, Radio France, Arte, France Médias Monde (France 24 et RFI), TV5 Monde et l'Institut national de l'audiovisuel (Ina). Cette ressource est devenue d'autant plus stratégique depuis la suppression de la publicité en soirée puis dans les programmes pour enfants, sur les chaînes du service public. Depuis 2018, l'exécutif a demandé à l'audiovisuel public de couper dans ses dépenses tout en réduisant régulièrement sa contribution. À titre d'exemple, la redevance rapporte cette année 2,4 milliards d'euros à France Télévisions, sur un budget total d'environ 2,8 milliards. Radio France soulignait pour sa part en décembre une baisse pour la quatrième année consécutive de la contribution publique, qui représente près de 566 millions d'euros sur un budget total de 639 millions d'euros. La suppression de la redevance suscite donc des craintes pour l'avenir de l'audiovisuel public. «Soit l'État continue de financer l'audiovisuel public et mobilise de l'argent public, donc celui du contribuable. Soit il ne compense pas la fin de la redevance et réduit donc les moyens de l'audiovisuel public», ont mis en garde mi-mai les trois sociétés des journalistes (SDJ) de France 2, France 3 et franceinfo.fr.

Par quoi la remplacer ?

C'est la principale question. Ces derniers mois, l'exécutif a martelé que c'était uniquement l'outil redevance qu'il voulait supprimer, et non le financement lui-même. Juste avant sa réélection, Emmanuel Macron a émis l'hypothèse de définir un budget sur plusieurs années, afin que celui-ci «ne donne pas lieu à la régulation budgétaire dans l'année par le gouvernement». Cette question est centrale car au-delà du montant de l'enveloppe, certains craignent une perte d'indépendance de l'audiovisuel public vis-à-vis de l'État en fonction du mécanisme de financement choisi. Un système de redevance garantit un «montant affecté directement chaque année», avait déclaré en mars à l'AFP le sénateur PS David Assouline, rapporteur de la commission d'enquête du Sénat sur la concentration des médias. De quoi circonscrire «les aléas d'une décision budgétaire, avec arbitrage de Bercy et d'un gouvernement tous les ans», et garantir «de la pérennité et de l'indépendance au service public», avait-il poursuivi.

Comment font les autres pays ?

Selon un rapport parlementaire paru en 2021, le montant de la redevance en France «apparaît particulièrement faible par rapport à nos voisins européens». Elle est en effet «de 251 à 320 euros selon les régions» en Autriche, de 312 euros en Suisse, de 220 euros en Allemagne ou encore de 181 euros au Royaume-Uni, selon ce rapport mené par la députée LREM Céline Calvez. En rapportant le financement des médias publics au nombre d'habitants, la France pointe au 14e rang européen seulement, «à un niveau équivalent à celui de la Slovénie». En regardant le montant des financements des médias publics en valeur absolue, sans tenir compte du nombre d'habitants, la France figure au 3e rang en Europe. Avec 4,1 milliards en 2019, elle arrive toutefois loin derrière l'Allemagne (9,5 milliards) et le Royaume-Uni (6,9 milliards).

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