Face à la menace de la standardisation, le rôle des agences de communication est plus que jamais de créer de nouveaux récits capables de générer de la valeur pour les marques, en mêlant surprise, pertinence et engagement.

Entre 0,1 % et 10 %. C’est la part d’une campagne display véritablement efficace par rapport aux KPI qui lui sont assignés. Au mieux, les 90 % restants ont une utilité marginale. C’est pourquoi je me méfie de la tendance à chercher à amplifier un message en multipliant à l’extrême les canaux de diffusion, et préfère l’augmentation des idées.

Savez-vous ce qu’ont en commun un avatar, un aéroport et une plateforme de VOD ? En inventant un personnage dans Fortnite permettant à des enfants victimes de maltraitance d’alerter les autorités en toute discrétion, en changeant le nom du plus grand aéroport d’Europe (Charles de Gaulle en Anne de Gaulle) pour sensibiliser le grand public au handicap, ou encore en mobilisant de grands noms des médias et du divertissement pour inciter les Français à décaler leurs habitudes de consommation en période de pénurie énergétique, nos agences ont créé l’événement et changé les comportements en revenant aux fondamentaux de notre métier : les idées.

Aujourd’hui, 75 % des marques pourraient disparaître sans bruit. Elles seront encore plus fragilisées par la myriade de contenus générés instantanément par les outils d’IA. Le plus grand risque qui guette aujourd’hui les annonceurs est la moyennisation, voire la standardisation, de leurs stratégies de communication. Si l’on fait tous la même chose, seul celui qui dépense le plus a une chance d’émerger. Non, l’enjeu, c’est de créer une relation « SPEciale » entre les marques, leurs clients et toutes les parties prenantes, c’est ainsi que je conçois le rôle des agences de communication moderne. J’insiste sur les trois premières lettres de « SPEciale », au sens anglosaxon du terme.

Le S de Surprise, d’abord. Nous faisons ce métier pour créer l’étonnement au milieu du flot, en trouvant de nouvelles expressions créatives ou média, à la croisée de la communication et de l’entertainment, en revisitant les anciens formats, ou encore en réinventant l’expérience événementielle ou digitale… Trouver de nouveaux territoires d’expression, via des médias inattendus et des contenus sortant de l’ordinaire, et ainsi apporter le supplément d’âme qu’aucune technologie ne saurait concevoir à ce jour, c’est le cœur du rôle des communicants.

Le P de Pertinence, c’est notre seconde boussole, afin de toujours viser juste avec le bon insight, le message juste au bon endroit dans l’humeur du moment. Pour lancer Validé, une série Canal+ sur le rap, nous avons mis des affiches dans des villes virtuelles de jeu vidéo. Le ROI a été inouï. Par cette créativité, nous avons gagné la bataille de l’attention vers laquelle les médias premium sont en train de se tourner.

Et enfin, le E, pour Engagement. Cet objectif doit nous guider pour répondre au désir d’une communication qui dépasse le seul impact, qui crée des communautés qui cultivent leur jardin ou veulent changer le monde.

Plus de 70 % des personnes estiment que les marques devraient s’investir davantage pour améliorer leur bien-être. Personnel ou collectif. La quête de sens est une opportunité encore peu exploitée pour recréer du lien entre les marques et leurs clients.

Chercher, tester, optimiser, les possibilités ouvertes par les outils d’intelligence artificielle générative en matière d’inspiration et d’efficacité sont immenses. L’IA augmente la puissance d’innovation, de production ou de distribution d’une idée, mais encore faut-il en avoir une. Plus que jamais, il nous faut créer de nouveaux récits capables de créer de la valeur pour les marques dans une consommation nécessairement plus frugale. C’est un défi immense, c’est la magie de notre métier que de le relever.

Je conclurais sur une formule de Raphaël Llorca dans son dernier ouvrage : il y a de plus en plus un risque d’avoir « de la communication partout et de la narration nulle part ».