Tribune
Dans un contexte de défiance vis-à-vis de nombre d'influenceurs, de plus en plus de socionautes se tournent vers les micro et nano-influenceurs. Leur reach n'a d'ailleurs rien à envier aux macro-influenceurs.

L’influence est un marché en plein essor, les budgets alloués à ces campagnes sont en forte croissance, et les projections des années à venir ne font qu’accentuer cette tendance. Pourtant, un contresens existe souvent quant à sa définition. L’influence est le pouvoir social et politique de quelqu'un, d'un groupe, qui leur permet d'agir sur le cours des événements, des décisions prises... Le simple fait de pouvoir modifier le processus décisionnel constitue de l’influence, quel que soit la décision finale adoptée. Historiquement, les influenceurs ou leaders d’opinion tenaient leurs titre de leur statut ou de leur profession : politique, sportif, artiste, journaliste... A l’époque, l’information était diffusée par une figure d’autorité (télévision, journal, site internet...). Seuls les journalistes ou les entreprises pouvaient diffuser l’information et donc exercer une influence sur les citoyens. Nous parlions alors de logique top-down, du haut vers la masse.

Mais l’apparition des réseaux socio-numériques a tout changé. Désormais, n’importe qui peut créer du contenu et être écouté partout dans le monde. L’information circule de manière horizontale ou transversale. Cette création de contenu par les internautes a fait émerger une nouvelle figure, celle de l’influenceur digital. Au début, via des blogs, puis progressivement par les réseaux sociaux. Ces influenceurs ont connu un franc succès pour leur liberté de ton, la capacité pour l’internaute de se reconnaître à travers lui. Une sorte d’effet miroir.

Ce sont des quidams qui ont commencé à prendre des photos avec leur téléphone, ou se filmer dans leur chambre. Ils achetaient eux-mêmes leurs produits et partageaient leurs bons plans. Aujourd'hui, les influenceurs se professionnalisent, sont désormais rémunérés pour des publications. Ce qui a fait leur succès est en train de disparaître. Cette évolution soulève la question de la légitimité. L’intermédiation des leaders d’opinion par des institutions permettait un contrôle des messages diffusés et une légitimité organisationnelle plus que personnelle. Si un média donnait une information, la valeur de celle-ci dépendait de la légitimité que nous accordions au média et non au journaliste qui écrivait l’article.

Renouer la confiance

Avec le web 2.0, le paradigme est différent. Des influenceurs pullulent dans de nombreux domaines à risques : jeux d’argent, alcool, ou vulgarisation scientifique. D’autres sont reconnus dans un domaine mais en sortent pour parler d’un sujet sur lequel ils n’ont aucune légitimité : friandises, thé detox... Les exemples ne manquent pas. Avec ces dérives, la confiance envers ces macro-influenceurs s’érode. « Les chéris, je sais pas si vous avez déjà entendu parler du bitcoin (...). C’est vraiment sûr, c’est vraiment cool, si ça vous intéresse, vraiment vous pouvez y aller les yeux fermés !», disait Nabilla dans une story Snapchat en janvier 2018. Dans ce contexte, comment faire à nouveau confiance aux influenceurs ? Les socionautes ont trouvé une parade pour éviter de répondre à cette question : quitter les macro-influenceurs pour se tourner vers de nouveaux gages de confiance : les micro et nano-influenceurs. Selon une étude de septembre 2018, 69% des Français sondés font davantage confiance au contenu (avis client, notation...) généré par un autre consommateur pour effectuer des achats. Seuls 22% des sondés font davantage confiance à un influenceur. Or ces micro et nano-influenceurs sont plus des consommateurs que des influenceurs.

Selon une étude de l’Observatoire de l’influence de l’agence WOÔ, les micro-influenceurs ont un reach largement supérieur aux macro-influenceurs pour les stories et pour les publications dans le fil d’actualité. Pour les micro-influenceurs, il s’élève à 24% pour les stories et 42% pour les publications, alors qu’un influenceur ayant entre 500 000 et un million d'abonnés a un reach de seulement 4% pour ses stories et 22,8% pour ses publications.

Les macro-influenceurs ont donc besoin de redorer leur blason, la plupart d’entre eux sont excellents en termes de qualité des contenus créés et bénéficient d’une large audience. Mais les dérives de certains entachent la réputation de la profession. Les années à venir seront déterminantes pour eux : la confiance avec leur communauté se rétablira par la qualité des collaborations et leur capacité à préserver la légitimité de leurs prises de parole. Pour l’instant, ce lien de confiance est bien plus fort pour les micro et nano-influenceurs. Ce sont les prochaines stars des campagnes d’influence.

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