Chronique

Bon, j’assume mon pauvre titre. Je fais partie de la vieille garde : je peux faire la blague. Mais force est de constater qu’en feuilletant le numéro anniversaire de Stratégies, j’ai eu une furieuse envie de connaître la suite : les pages de notre industrie qui seront écrites dans les prochaines années par la nouvelle génération. Une jeune génération qui attend de nous de vrais changements de modèles, de nouvelles représentations sociales, une plus puissante connexion au réel, à leur définition du réel en tout cas. Un réel perclus d’angoisses, d’urgence à agir et (parfois) d’envie d’en découdre. 

Car le fossé se creuse entre les jeunes et nous. Nous peinons à les attirer dans notre secteur et mesurons, au quotidien, le fossé culturel qui nous sépare. Nous ne rions pas des mêmes blagues, nos vannes potaches ne passent plus et leur hyper-sensibilité à l’urgence climatique, à l’égalité des genres, à la liberté individuelle nous laissent souvent pantois. Pourtant, la valeur n’attend pas le nombre des années et nous avons bigrement besoin de leur regard, de leur insolence, de leur radicalité. 

Reboot! 

J’ai eu le plaisir de participer à un événement organisé par une jeune garde de communicants et d’enseignants tout juste sortis d’écoles ou ayant déjà lancé leur activité : consultants, créatifs, chargés de cours qui ont souhaité apporter leur contribution au débat sur la place de la communication dans la Transition écologique. Frustrés de voir la loi climat et résilience renoncer aux propositions les plus radicales portées par la Convention citoyenne pour le climat sur la publicité et le « conservatisme du secteur » défendant, à leurs yeux, un « statu quo d’un autre âge et une vision obsolète du rôle de la communication ».  

Pas de structure associative, pas de financement, juste la puissance des réseaux et une gouvernance bigrement efficace, Reboot! a réussi à toucher, via un large réseau d’écoles (61 écoles partenaires), plus de 8000 étudiants d’écoles de communication, publicité, relations presse, relations publiques, influence, numérique… Pendant deux jours de talks, workshops, débats… Reboot! avait l’objectif « d’améliorer la formation initiale sur la communication responsable, inciter à des pratiques plus responsables et contribuer à établir de nouvelles normes pour les métiers de la communication ». « Il n’est plus concevable d’attendre, il faut agir maintenant ! » Charles et Arnaud, cofondateurs (avec d’autres), sont francs et directs. Tant mieux. À travers leurs propos, ne disent-ils pas surtout leur goût de nos métiers et leur envie de s’y engager ? 

Conflit de générations ? 

Mais rester entre soi, dans une classification d’âges, est un énorme risque. Cela crée des murs et des réflexes de défense grégaires. Je regrette ici mon introduction. Me définir par ma date de naissance est une ânerie. Cela prive de partage, de cohésion, de solidarité. Une génération, c’est aussi tous les contemporains d’une même période, d’un même contexte. Ne sommes-nous pas, toutes et tous, de la même « génération climat » ?  

Il nous faut construire, ensemble, un consensus autour de la place de la communication dans le chantier pharaonique de la Transition. À nos instances, institutions et organisations professionnelles d’intégrer ces envies d’agir. Prenons au sérieux les idées radicales, dérangeantes, disruptives. Nous avons besoin de toutes les énergies. À nos cadets d’intégrer la valeur du débat et l’expression du dissensus qui produiront, j’en suis certain, les nouvelles formes de coopération dont nous avons furieusement besoin.  

(Je pense également ici à Youth For Climate qui, avec 130 groupes locaux, relaie l’action du mouvement Friday For Future de Greta Thunberg).

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