Tribune
Que ce soit vis-à-vis des collaborateurs, des clients ou des partenaires, la crise de la Covid-19 requiert des entreprises qu'elles communiquent avec le mot et le ton attendu. Cette empathie permettra de maintenir la confiance.

La pandémie de Covid-19 crée de nombreux défis pour les organisations, parmi lesquels la nécessité de s’adapter en permanence à un contexte peu lisible. Face à une situation qui évolue sans cesse, difficile de se projeter sur le court ou le moyen terme. Ce contexte évolutif provoque une anxiété dans la société, anxiété qui génère de la paralysie, à l’inverse de la peur, qui est un réflexe de survie poussant à agir. Dans la gestion de cette crise inédite, les entreprises et les institutions publiques ont dû accepter l’incertitude permanente. De nombreuses organisations se sont montrées résilientes dans leur manière de vivre cette crise totale et protéiforme.

Pour autant, de nombreux signaux tels que la faible acceptabilité des mesures sanitaires de distanciation sociale, la création d’une bulle relationnelle, la mise en œuvre stricte du télétravail ou encore les spéculations sur la manière dont nous pourrons fêter Noël, nous montrent qu’un élément crucial manque au pilotage de cette crise : le ressenti des citoyens, des collaborateurs n’est pas assez pris en compte par les organisations dans la formulation de leurs messages et la manière dont ils les délivrent. Cette absence de prise en compte de la dimension émotionnelle du Covid s’observe au quotidien avec des effets parfois dramatiques à tous les niveaux de la société.

Au niveau professionnel d’abord, la faible application du télétravail par les dirigeants continue de générer des incompréhensions dans de nombreux secteurs permettant de travailler à distance. En parallèle, de nombreux salariés et travailleurs indépendants évoquent des difficultés à se projeter sur la continuité de leurs activités. Au niveau psychologique ensuite, différentes enquêtes ont montré une progression des états d'angoisse, d’épuisement et de lassitude liés aux conséquences de la pandémie. Les chiffres de Santé Publique France sont édifiants à cet égard : l'enquête CoviPrev, dont la première vague a été lancée le 23 mars, indique un taux d’anxiété de 26,7%, soit le double du taux observé en 2017, hors contexte de crise sanitaire. Enfin, dans toute la société, les observateurs notent une montée des tensions, un repli sur soi, en plus de l’augmentation significative des états dépressifs.

Créer la relation empathique

En analysant les transformations induites par la crise du coronavirus, certains professionnels aguerris de la communication de crise pointent la nécessité d’introduire une culture de l’incertitude dans la gestion de crise. Cette recommandation pertinente n’a de sens qu’en la couplant à un dispositif d’écoute du ressenti des publics, sans quoi le niveau d’anxiété général ne fera que croître et la résilience des organisations sera mise à mal rapidement.

Revenir aux fondamentaux des sciences de la communication permet de retrouver les clés d’une empathie nécessaire pour engager toutes les parties prenantes. Et créer la relation empathique, celle qui donne ou entretient la confiance, ne se décrète jamais : elle suppose de se placer dans une posture d’écoute active vis-à-vis de l’autre. La situation de crise qui se présente à notre société doit nous conduire à nous «mettre à la place» de nos cibles. Le message est détenu par les parties prenantes. Il nous suffit d’écouter pour communiquer avec le mot et le ton attendu. C’est à cette condition que nous pourrons maintenir la confiance de collaborateurs, de clients et de partenaires, et leur permettre de rester dans une énergie propice au rebond.

Dans le cas précis des collaborateurs, cette écoute active est une attention qui permet de préserver le lien intact avec l’entreprise, de rompre ou éviter l’isolement, mais c’est aussi un moyen de partager cette épreuve de la pandémie et du confinement dans un esprit de coopération. L’écoute est la clé d’un après-crise qui aura renforcé cohésion et sentiment d’appartenance, et coupé court au conflit ou à la perte de motivation potentiels.

Entretiens d’évaluation psychologiques

A la faveur de cette crise inédite, la communication interne retrouve tout son sens, et pourrait-on même dire, sa noblesse. Elle seule permet d’envisager l’adaptation au moment présent et l’anticipation de l’après dans les meilleures conditions. Alors que les équipes sont aujourd’hui réparties dans et hors les murs, c’est tout le sel de la relation humaine qui va permettre la sortie de crise.

Le législateur a prévu dans les protocoles de privilégier des entretiens d’évaluation psychologiques dans les chartes de télétravail, pour éviter les situations d’isolement, de perte de confiance, de dépression. Ces entretiens sont de bons outils pour évaluer en surface, mais il existe aujourd’hui des solutions qui permettent de questionner à distance les collaborateurs pour connaître avec précision leur ressenti, à travers des réponses libres et anonymisées. C’est dans cette parole libre que l’on pourra détecter le signal faible, ce signal infime qui dit beaucoup, et permet parfois de prévenir la crise ou l’incident avant qu’il ne se produise.

Encore une fois, c’est dans les mots de celles et ceux qui vivent la situation que se trouve le bon message. Si toute crise augure un changement, gageons que cette crise de la Covid-19 soit un déclencheur pour que l’écoute, la relation humaine, la quête de sens dans le travail deviennent l’alpha et l’omega du monde de demain. Cela contribuera à favoriser la meilleure communication de crise qui soit : celle qui n’a jamais besoin d’être déclenchée.

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