Chronique

Loin de dénigrer les compétences techniques, qui sont nécessaires pour faire tourner une entreprise et mener à bien ses missions, un changement s'avère nécessaire pour contrer le discours trop répandu consistant à les mettre en concurrence avec les compétences comportementales.

R.O.I, KPis… Marge brute, nette, opérationnelle… Taux de rentabilité, taux de transformation en volume/en valeur… Si vous n’avez pas déjà abandonné la lecture de cette tribune, c’est que vous êtes à l’image de ces objectifs : définitivement S.M.A.R.T. Petit rappel pour les non-initiés de la performance chiffrée : l’acronyme SMART désigne des objectifs : Specific, Measurable, Accessible, Relevant et Temporal… tout un programme. 

Avec de telles considérations, nous sommes armés pour faire face à toutes les situations comptables imaginables. Mais c’est oublier un détail : nous sommes également comptables d’un élément au moins aussi déterminant dans nos résultats professionnels : nos qualités humaines. A-t-on déjà vu une calculatrice réaliser une stratégie pertinente ? Ou un tableau Excel exécuter une création propre à émouvoir des millions de personnes ? Naturellement, non. Malgré les efforts déployés dans tous les domaines de l’entreprise pour remplacer l’homme par des robots ou des logiciels, force est de constater que nos métiers, notamment ceux de la créativité, restent irrémédiablement ancrés dans l’humain. 

Beaucoup d’entreprises nous interrogent sur leur EVP (Employee Value Proposition) pour favoriser les recrutements, le bien-être de leurs employés mais surtout pour replacer les collaborateurs au cœur de leur business model… preuve que les hommes sont aujourd’hui un sujet « sensible ». Loin de moi l’idée de dénigrer les compétences techniques. Elles sont nécessaires pour faire tourner une entreprise et mener à bien ses missions. En revanche, un changement s’impose pour contrer le discours trop répandu consistant à les mettre en concurrence avec les compétences comportementales. « Hard skills versus soft skills » : la formule fait réagir, mais au-delà des mots, elle mène à un questionnement de fond.

Savoir communiquer avec les autres, être capable de s’intégrer harmonieusement dans une équipe, proposer des solutions innovantes et créatives sont autant d’atouts qui ne s’apprennent pas dans les chiffres et qui font une vraie différence dans l’environnement professionnel. Une étude Michael Page/Cadremploi l’atteste : 62% des entreprises sont prêtes à recruter un candidat principalement sur ce type de qualités. Ce qui signifie qu’elles sont une majorité à reconnaître que la sensibilité, loin d’être un point à occulter, permet de faire la différence entre un pro et un « bon pro ». 

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Mais parce qu’ils sont abstraits, ces atouts sont difficiles à valoriser, à développer mais surtout à préserver. D’autant plus qu’une nouvelle couche de compétences s’ajoute désormais aux soft skills : les mad skills (compétences folles). Il s’agit d’aptitudes que confèrent la pratique d’une activité passion et qui peuvent s’avérer utiles dans le cadre professionnel… À l’image de l’observation de l’art, qui s’avère être un puissant levier de performance professionnelle. Pauline Pons*, historienne de l’Art, l’a bien compris. Aujourd’hui, elle aide de nombreux patrons à se reconnecter à leur sensibilité, à travers l’étude des œuvres. Grâce à cette approche, ces professionnels reconnaissent être plus à l’écoute de leurs collaborateurs et améliorent le collectif au sein de leurs équipes… donc leurs compétitivités. 

Alors, réconcilier le business et les émotions, c’est vertueux ? Sans hésitation : oui. Et c’est même souhaitable. En agence comme dans l’ensemble des entreprises, le succès tient avant tout aux femmes et aux hommes qui s’émeuvent de leur environnement, qui parviennent à écouter vraiment leurs interlocuteurs, mais aussi, qui s’écoutent eux-mêmes. À travers les valeurs qu’ils portent et à travers ce qu’ils sont, ils enrichissent une stratégie ou une création. Jusqu’à présent, on n’a pas trouvé de meilleur ambassadeur que l’humain pour susciter un attachement émotionnel à une entreprise ou une marque. Et ça tombe bien : c’est justement cette sensibilité qui fait toute la valeur de nos métiers… et la performance de nos agences. 

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