Tribune
La confiance est mal en point dans l’ensemble des pays occidentaux. Après les gouvernements et les entreprises, le voile du soupçon s’étend progressivement aux marques. Souvent incriminée dans le malaise de nos sociétés, la tech peut-elle rester silencieuse face à ce phénomène ?

Quand deux Français sur trois se méfient du pouvoir politique, on en compte aussi un sur deux qui ne fait pas confiance aux pratiques des entreprises. Pourtant, la confiance est le moteur de nos communautés ; c’est elle qui assure le fonctionnement de la démocratie et des marchés. Sans confiance, pas d’élections libres et incontestables, pas de libre-échange, pas de foi en l’avenir, pas d’investissements ni de dépenses…

La technologie joue un rôle tout particulier dans cette suspicion. Si la tech s’est imposée dans un quotidien désormais jalonné par nos expériences avec les GAFA, elle est aussi au cœur de nos craintes. Selon le Trust Barometer d'Edelman, elle entraîne dans son sillage, pour près de 80% des citoyens, la peur de perdre son emploi, que ce soit en raison des bouleversements RH, de l’automatisation ou de la perte de compétences. La tech effraie car elle s’immisce chaque jour davantage et elle agit implacablement sur nos vies : postes de travail réorganisés par la transformation digitale, emplois supprimés par la montée des plateformes, règles fiscales contournées par des entreprises sans frontières ou bien données personnelles collectées par nos applis de messagerie…

Et pourtant, la tech porte en elle les espoirs de notre époque, les plus immédiats comme les plus fous : smart cities ou éradication des maladies, transition énergétique et voitures autonomes, en passant par la conquête spatiale. Il n’y aucun défi que l’accumulation des données et les progrès de l’apprentissage automatique ne promettent demain de résoudre. Mais le sait-on vraiment ?

L’urgence à communiquer

Avec une chute record de la confiance dans la technologie (-10% sur un an), la France affiche la dégradation la plus sévère de la perception du secteur. Et c’est pourquoi, ici, les entreprises de technologie ont un besoin pressant de se faire comprendre. Au-delà des levées de fonds ou des fonctionnalités produits, elles doivent faire entendre leurs intentions pour dissiper les inquiétudes. La consommation est entrée dans l’ère du belief-driven et nous sommes aujourd’hui motivés par nos convictions au-delà des promesses du produit. Plutôt que de se cacher derrière une interface web, les acteurs de la tech doivent prendre la parole pour nous convaincre de l’utilité et de la bienveillance de leur projet. Plus qu’aucune autre industrie, la tech a le pouvoir de disrupter nos vies. Plus qu’aucune autre industrie, elle doit démontrer sa volonté de contribution sociétale.

Pour la stratégie à mettre en place, ce sont évidemment les relations publiques qui doivent accompagner cet effort de transparence. La publicité n’est pas l’instrument adapté pour faire valoir le positionnement corporate : si elle sait vous expliquer quelle marque de poudre lave plus blanc, la publicité se garde de vous révéler comment la marque applique semblable traitement à ses bénéfices… Et, de fait, avec la récurrence des leaks, quelle campagne de publicité pourrait vous rassurer sur le sort de vos données personnelles ? Seules les relations publiques peuvent installer ou restaurer la crédibilité nécessaire à l’adoption de l’innovation disruptive.

Bien sûr, les relations publiques impliquent la prise de position des dirigeants et le cran d’affronter le regard des médias. Mais c’est le chemin à emprunter pour asseoir la légitimité de la tech face à l’opinion publique. Être mieux comprise pour se faire accepter. Et pouvoir relever avec succès les challenges de la réputation, du business et du recrutement. La tech a certainement de beaux jours devant elle, mais ses acteurs ne peuvent plus résumer leur mission à un exercice de geeks sans état d’âme. Les marque de technologie doivent simplement comprendre la nécessité du dialogue avec l’écosystème. C’est la définition même des relations publiques.

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