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L'immigration professionnelle a baissé de 26% en 2011

«Plus qu'une erreur, c'est une faute», a lâché le 8 janvier sur Europe 1 Jacques Attali, président de Planet Finance, auquel Nicolas Sarkozy avait confié, en 2008, une commission chargée de «libérer la croissance». La circulaire Guéant du 31 mai, qui oriente la politique d'immigration professionnelle en limitant les titres de séjours des étudiants étrangers diplômés, n'en finit pas de faire parler d'elle.

Sleiman, de nationalité algérienne, qui bénéficiait ainsi d'un contrat à durée indéterminé en tant que Community Manager dans un groupe de presse, a été contraint d'y renoncer: à la fin 2011, il n'avait plus l'autorisation de travailler sur le territoire français. Son responsable a alors envoyé un mail aux salariés de l'entreprise pour «expliquer les raisons de son départ». L'éditeur n'est pas parvenu à convaincre la préfecture de Paris de son choix d'embaucher un étranger plutôt qu'un ressortissant de l'Union européenne.

Ce type de réactions est loin d'être isolé. Ouest France relate, dans son édition du 10 janvier, le cas d'une entreprise bretonne de l'agroalimentaire qui a vu partir sa recrue russe alors qu'elle cherchait depuis trois ans la personne idoine pour se développer en Russie. «En limitant la venue d'étudiants brésiliens, russes, indiens ou chinois en France, et les possibilités de réaliser des stages et de travailler sur le territoire, ce sont les entreprises françaises que l'on prive des compétences nécessaires pour se développer dans ces pays à forte croissance», souligne Stéphan Bourcieu, directeur du groupe ESC Dijon Bourgogne, dans La Tribune du 4 janvier.

En 2011, selon les chiffres publiés le 10 janvier par le ministère de l'Intérieur, 9 154 ressortissants étrangers ont été autorisés à venir en France dans le but d'y exercer une activité salariée, contre 12 404 en 2010, soit une baisse de 26%. Autant dire donc que la France ne croule pas sous l'immigration légale de l'emploi.

Peut-elle donc se priver de talents et compromettre l'attractivité de ses grandes écoles et universités en n'offrant aucune possibilité de première expérience professionnelle sur le marché de l'emploi national? Cela n'a pas échappé à certains ministres, comme celui des Affaires étrangères, Alain Juppé, qui a déclaré le 6 janvier à la radio tunisienne Radio Express FM que «la circulaire a été rédigée de manière inappropriée et doit être modifiée».

Calcul électoraliste

Le 10 janvier, sur RMC, le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, a donc dévoilé les grands axes de ces modifications. «Si quelqu'un obtient un master, il a le droit d'avoir une expérience professionnelle de six mois, susceptible d'être prolongée, a t-il expliqué. Et si c'est un diplôme de haute qualification, qui correspond à un besoin de nos entreprises, la situation de l'emploi ne lui est pas opposable.» Il est pourtant fort probable que cela ne fera pas taire la contestation. Brigitte Porée, de la Conférence des grandes écoles, estime qu'il y «quelque chose qui ne va pas d'attirer des étudiants dans des formations tout en leur refusant après l'autorisation de travailler». Fatma Chaouieb, du collectif du 31 Mai (voir encadré), rappelle qu'aux Etats-Unis comme en Allemagne, les diplômés ont un an pour trouver un travail qu'ils peuvent ensuite occuper.

Pour elle, il n'y a donc guère de doute: il s'agit d'un calcul électoraliste pour draguer les électeurs du Front national. Le communiqué de presse du 10 janvier de Claude Guéant, sur l'immigration, ne peut pas lui donner tort: il est entièrement adressé à Marine Le Pen.

 

Fatma Chaouieb, porte-parole du collectif du 31 mai, diplômée de HEC

«La copie est totalement à revoir. Ni dans sa forme ni dans son contenu, la circulaire n'est modifiée. Les critères d'appréciation sont toujours laissés aux agents de préfecture avec pour mot d'ordre la réduction de l'immigration légale du travail. Le nouveau texte, qui écarte les diplômés étrangers hautement qualifiés titulaire au moins d'un master, prend appui sur cette circulaire et n'apporte rien. Le seul symbole fort ne peut être que le retrait de la circulaire. Lui seul peut rassurer l'ensemble des parties prenantes et éviter de gros dégâts sur l'image de la France auprès des étudiants du monde entier.»

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