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Invités, du moins sur le papier, pour tester une nouvelle console de jeux, des enfants ont vécu une matinée surprenante et ludique grâce à Pierrot Gourmand. La marque de confiserie a tourné avec eux une campagne digitale, qui sort en ce mois de mai.

En arrivant sur le lieu de rendez-vous, ce mercredi 22 mars au matin, un certain étonnement domine. Situés rue de Vaugirard, à Paris, ces bureaux Regus sont tout ce qu’il y a de plus sobre. Et pourtant, c’est bien là, au 7e étage, que l’agence de communication santé Les Darons, son client Pierrot Gourmand (groupe Andros) et une équipe de tournage ont pris leurs quartiers. La mission du jour : réaliser la prochaine campagne digitale de la marque de sucettes et autres confiseries, suite au lancement d’une nouvelle gamme de produits. Une campagne annoncée pour ce mois de mai, mettant en scène de très jeunes consommateurs, autour de cinq ans. On s’attendait à moins formel, pour un lieu accueillant des enfants…

Et pourtant, c’est là toute la subtilité du dispositif. Car les tout jeunes participants, plus d’une douzaine au total sur les deux sessions de la journée, n’ont encore aucune idée de ce qui les attend aujourd’hui. Pour ce qui les concerne, ils croient être venus tester une nouvelle console de jeux vidéo – la « Dream Box », annonce une affichette sur la porte d'entrée – après que leurs parents, pas davantage dans la confidence, ont répondu à une annonce préalablement diffusée sur les réseaux sociaux. Pour le moment, leurs mamans – pas un seul papa, force est de constater – sont interrogées par une personne de l’équipe sur la pratique du jeu vidéo et des écrans par leurs rejetons. « La sélection des enfants a été difficile : il fallait qu’ils soient dynamiques, spontanés, pas trop timides, représentatifs de la société. À un moment, il n’y avait que des petits blonds, nous ne pouvions pas en rester là », confie-t-on chez Les Darons.

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Voilà que l’animation commence. Manette de jeu en main – l’agence a poussé loin la malicieuse supercherie –, les petits attendent avec impatience de pouvoir accéder à la fameuse nouvelle console. Compte à rebours… Puis, pas de chance, problème technique. Aussi, surprise, quand les portes s’ouvrent, c’est non pas sur un jeu vidéo mais sur une salle de jeux, une sorte de coin aux merveilles à faire pâlir d’envie toute personne de moins de dix ans. Si interrogation il y a eu, elle dure quelques secondes tout au plus. Voilà maintenant les enfants investissant à leur rythme les lieux, avec l’aide de deux animateurs, explorant l’espace tout juste révélé, avec grande fusée à colorier, maison de poupée, poufs colorés et peluches, etc. Pas de protestations ni de caprices. « Tout tenait sur la réaction des enfants. On ne savait pas comment ils allaient réagir… », avance l’agence. Le risque était que la déception s’invite plutôt que le jeu. Qu’un enfant, plus impatient que les autres, entraîne le groupe vers une pente qui n’aurait pas arrangé la marque…

Car la finalité, c’est tout de même que ces différents moments scénarisés ont été captés par des caméras pour la future campagne. L’idée était de montrer que, au-delà des écrans, la puissance de l’imaginaire demeure. C’est le message que veut porter Pierrot Gourmand, dont la signature est « C’est si bon d’être dans la lune ».  Non, les enfants n’ont pas nécessairement besoin d’un écran pour s’amuser ou se connecter aux autres, oui, ils peuvent le faire autrement tout en développant leur sens de l’observation, leur imagination et leur capacité à raconter des histoires. La marque porte, dans le même temps, un message contre la surconsommation, des écrans comme de sucre. « Nous avons été surpris par l’idée de l’agence, dans le bon sens du terme, car nous prônons un usage raisonné du produit, le fait de prendre le temps voire de s’ennuyer pour laisser libre cours à son imagination. Aussi, nous avons une gamme de bonbons autour du côté créatif », c’est-à-dire avec des packagings conçus pour inciter à la créativité, retrace Marie Lafon, chef de produit Pierrot Gourmand. D’ailleurs, en plus des sessions de jeu, l’équipe tourne de courts dialogues où les enfants racontent ce qu’ils viennent de vivre et imaginent des histoires à partir d’images choisies sur des pancartes, skate, crocodile, sirène… Les mamans, quant à elles, sont aussi de nouveau interrogées, notamment sur les réactions de leurs enfants.

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Un « prank » audacieux que Les Darons revendique comme une marque de fabrique. Cette agence de communication n’est pas spécialisée dans les annonceurs santé mais entend aider les marques de tous les secteurs à développer un discours autour de ce thème. Et tout le monde n’aurait sans doute pas osé lancer un tel dispositif, avec sa part d’incertitudes, reposant sur la spontanéité des enfants. « Nous ne prenions pas non plus un risque énorme. On parle de jeux pour enfants… », assume Marie Lafon, qui comptait bien sur les jouets pour les émerveiller.

Le projet devait répondre à une attente bien précise. « Le brief était de promouvoir la nouvelle gamme. Nous avions préalablement accompagné son repositionnement donc nous savions la philosophie que nous souhaitions imposer, réenchanter la vie, défendre la slow life, donner le droit de rêver », indique Alex Bruère, codirigeant des Darons avec Frank Leroux. Pas chose si aisée face à des concurrents comme Haribo, et alors que l’entreprise conserve par certains côtés une image d’Épinal avec la figure du Pierrot, évoquant une certaine nostalgie. Pour réussir, il a fallu mettre sur pied un univers, en s’inspirant de celui de la marque, une mécanique de captation, avec des caméras discrètement intégrées au dispositif pour ne pas perturber les sessions de jeu, construire et habiller la fameuse pièce – un travail confié à Elsa Courtois, fondatrice de Zazebytheway, entreprise notamment spécialisée dans la décoration et l’aménagement d’intérieur – ou encore penser à la déclinaison des images, support par support. Le tout appuyé sur un discours médical. Un pédiatre, consulté au cours de la conception de la campagne était présent sur le tournage.

S’ajoutent les précautions particulières à prendre compte tenu du casting, comme sur tout tournage impliquant des enfants, avec, par exemple, des obligations de visite médicale en amont. « C’était l’une des difficultés avec le fait de devoir garder le secret », relate Alex Bruère. L'opération a nécessité six mois de travail et l’implication de plus d’une vingtaine de personnes. Dont aucune dans la lune. Ou peut-être que si ?

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