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La domination sans partage de Google et Facebook dans la publicité en ligne est loin d’être inquiétée, pourtant, les fortes croissances d’Amazon, Pinterest et Snapchat disent qu’une autre voie est possible.

En marge des deux blocs que constituent Google et Facebook dans la pub en ligne, un groupe de non-alignés a confirmé son émergence en 2019. Amazon, on le savait déjà, accentue sa forte croissance dans le secteur. Snapchat, dont la rentabilité posait question, réussit à attirer de plus en plus d’annonceurs. Et Pinterest enfin, qu'on imagine volontiers hors des radars, ne dément pas sa dynamique, et c’est grâce à la publicité.

Suite à la publication des résultats du troisième trimestre de toutes les plateformes, un constat s’est imposé : les plus fortes progressions appartiennent à Snap (+50%), Pinterest (+47%) et Amazon (+44%). Suivent Facebook (+28%, mais probablement aidé par Instagram), Google (+17%) et Twitter (+8%). Pour le cabinet eMarketer, cité par CNBC, 2019 sera la première année où le duopole Google/Facebook, bien que contrôlant toujours le marché de la pub digitale, cédera des parts de marché aux États-Unis.

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Parmi les challengers, le plus sérieux est bien sûr Amazon, dont les revenus publicitaires ont pesé 3,6 milliards de dollars au troisième trimestre, et devrait franchir le cap symbolique des 10 milliards en 2019. Les synergies avec la place de marché et sa taille critique constituent une base solide pour son expansion dans le domaine, d’autant que cette activité (encore rangée dans «Autre» dans les résultats financiers, mais pour encore combien de temps ?) affiche désormais une plus forte croissance qu’Amazon Web Services. Le service de cloud d’Amazon était pourtant réputé pour être la vache à lait du groupe.

Signe de la traction du marché en faveur d’Amazon et de sa volonté de passer la seconde sur la pub, la plateforme organisait début octobre dans son fief de Seattle la première édition de son Amazon AdCon, un grand raout qui a attiré 400 annonceurs. Pour les analystes de SunTrust Robinson Humphrey cités par CNBC, le taux de croissance d’Amazon dans la publicité pourrait accélérer, au détriment du duopole en place.

Si Amazon est vu comme le plus sérieux rival, il faut encore relativiser ces chiffres : avec 3,6 milliards de dollars de revenus publicitaires, la société de Jeff Bezos est 10 fois moins importante que Google dans ce secteur sur le troisième trimestre. Pinterest, avec 0,3 milliard de dollars, est alors plus de 100 fois inférieur. Idem pour Snap, qui a réalisé 0,4 milliard de dollars de recettes. Exactement 17 milliards de moins que Facebook. Et que dire des taux de croissance des deux géants, qui ne semblent jamais fléchir malgré leur taille titanesque ?

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Alors que Facebook traverse une crise de confiance depuis l’affaire Cambridge Analytica et que Google – et notamment YouTube – n’a pas résolu tous ses problèmes de brand safety, un environnement maîtrisé tel que celui de Pinterest plairait à de plus en plus d’annonceurs. Pour 4C Insights, interrogé par CNBC, les gens utilisant Pinterest le font dans un état d’esprit positif : décoration de sa maison ou bien, préparation d’un voyage, à l’opposé au climat parfois anxiogène qui peut régner sur d’autres réseaux.

Pinterest publie de plus en plus de photos issues de catalogues d’e-commerçants partenaires, pourtant le site prouve que cette dilution du contenu ne fait pas fuir ses adeptes : au dernier trimestre, la plateforme a relevé le nombre d’utilisateurs actifs mensuels de 28%, à 322 millions – la croissance est même de 38% hors des États-Unis. Pour 4C Insights, Pinterest pourrait encore doper sa croissance en utilisant le format vidéo.

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Quant au réseau social au petit fantôme, « après des débuts difficiles, de plus en plus d'éditeurs découvrent que Snapchat est un moneymaker », titrait Digiday le 26 octobre. Le cœur du réacteur est Discover, le format média de Snap pour lequel beaucoup d'éditeurs se sont mobilisés dès 2015, allant jusqu’à constituer une équipe de sept personnes au Monde, dans l’espoir de toucher les plus jeunes. Et pour un retour sur investissement incertain.

« Mais les temps ont changé », écrit notre confrère. Whistle, qui exploite huit chaînes Discover, parle d’une « augmentation notable » de ses revenus ces derniers temps. Group Nine déclare à Digiday que « Snapchat est désormais rentable ». De même, Cosmopolitan, ESPN et NBCUniversal de Hearst disent tous voir des signes positifs. Un succès qui n’est même pas enrayé par la forte adoption de TikTok auprès des jeunes.

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Pour ce qui est du marché français, la situation est un peu moins enthousiasmante pour ces alternatives à Google et Facebook, dont la domination sans partage ne fait que s’accentuer. En 2018, les deux géants ont dépassé les trois quarts du marché, soit 75,8% de 5,2 milliards d’euros. Et ce, malgré les polémiques autour des données personnelles et les accusations de pratiques anticoncurrentielles.

Comme l’expliquait mi-octobre Karin von Abrams, analyste chez eMarketer dans un communiqué, « les annonceurs sont certainement attentifs aux enjeux juridiques posés par Facebook et Google et peuvent ergoter sur leurs conditions d'utilisation, mais ces deux plateformes offrent toujours aux publicitaires une capacité d'atteindre l'audience et une flexibilité énorme ». Au grand dam des médias taditionnels, dont les parts marché s’érodent encore et à qui Google et Facebook refusent même de payer des droits voisins.

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